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Août 1914 - La Vie en Lorraine (3/3)

 
août 1914 septembre 1914 octobre 1914 novembre 1914 décembre 1914
janvier 1915 février 1915 mars 1915 avril 1915  

Le général Joffre
ANNONCE
nos succès
En Lorraine, nous sommes à Château-Salins et arrivons à Fénétrange. - Notre canon démoralise l'ennemi. - En Alsace, une grande partie des vallées des Vosges sont à nous.

Paris, 18 août, 21 h. 45.
Télégramme du commandant en chef des armées françaises au ministre de la guerre
Le ministre de la guerre a reçu du commandant en chef le télégramme suivant :
Grand Quartier général des armées de l'Est, 18 août, 9 h. 15.
Pendant toute la journée d'hier, 17 août, nous n'avons cessé de progresser en Haute-Alsace. La retraite de l'ennemi s'effectue de ce côté en désordre. Il abandonne partout des blessés et du matériel.
Nous avons conquis la majeure partie des vallées des Vosges sur le versant d'Alsace, d'où nous atteindrons bientôt la plaine.
Au sud de Sarrebourg, ennemi avait organisé, devant nous, une position fortifiée, solidement tenue avec de l'artillerie lourde. Les Allemands se sont repliés précipitamment, dans l'après-midi d'hier.
Actuellement, notre cavalerie les poursuit.
Nous avons, d'autre part, occupé toute la région des étangs, jusque vers l'ouest de Fénétrange.
Nos troupes débouchent de la Seille, dont une partie des passages ont été évacués par les Allemands.
Notre cavalerie est à Château-Salins.
Dans toutes les actions engagées au cours de ces dernières journées en Lorraine et en Alsace, les Allemands ont subi des pertes importantes.
Notre artillerie a des effets démoralisants et foudroyants pour l'adversaire.
D'une façon générale, nous avons donc obtenu, au cours des journées précédentes, des succès importants et qui font le plus grand honneur à la troupe dont l'ardeur est incomparable, et aux chefs qui la conduisent au combat.
Signé : JOFFRE.

RAPATRIEMENT DES ITALIENS

Nancy, 19 août.
Huit cents Italiens, hommes, femmes et enfants, arrivés de Meurthe-et-Moselle, sont arrivés à Montauban.
Un orchestre improvisé a joué la «  Marseillaise » et l'hymne italien, ce qui a déchaîné une manifestation enthousiaste. Les Italiens ont salué l'hymne français par de nombreux cris de : «  Vive la Les rapatriés ont été dirigés sur Port-Vendres, où ils seront embarqués pour.
l'Italie.

A PAGNY-SUR-MOSELLE
Belle conduite des Italiens. - La première farine. - Les patrouilles allemandes ne songent qu'à «  bouffer » - Le premier prisonnier allemand. - Leurs obus. - Les escarmouches

Nancy, 19 août.
Nous avons rencontré, ce matin, un habitant de Pagny-sur-Moselle, qui nous a donné des détails intéressants sur la vie et les épreuves de cette petite ville de l'extrême frontière; depuis la déclaration de la guerre. Ce fut d'abord la mobilisation qui, comme partout, s'accomplit dans le plus grand calme et avec une parfaite régularité. Les nombreux Italiens, dont plusieurs sont établis depuis longtemps dans le pays, apportèrent le plus grand zèle, notamment dans le refoulement des bestiaux. Grâce à eux, on n'eut pas besoin de faire appel aux hommes mobilisables, qui purent rejoindre aussitôt leurs corps d'affectation.
Les Italiens s'employèrent également à la moisson, allant dans les champs, bien que n'ignorant point le danger qu'ils couraient, car les Allemands tiraient sans cesse dans la direction de la ville. C'est en grande partie au dévouement d'un entrepreneur italien, qui prêta son matériel et ses chevaux, que les récoltes coupées purent être rentrées dans les granges.
Cet honorable habitant nous dit aussi que tous les Italiens ont toujours manifesté leurs profonds sentiments d'amitié pour la France et affirme que si leur pays nous déclarait la guerre, ils refuseraient de partir, ne voulant point porter les armes contre la nation dont les habitants les ont toujours bien accueillis et leur ont fourni les moyens de gagner leur vie.
Puis ce fut l'anxiété des premiers jours de la guerre ; l'absence complète de farine pour faire le pain. Il fallut alors concasser le blé nouvellement battu ; c'est avec le produit ainsi obtenu, mélange de son et de gruau, - qu'on fit du pain. Notre interlocuteur nous en montre en riant un morceau. C'est une espèce de galette, de couleur grisâtre, sans être levée et qui est rien moins qu'appétissante.
- «  Voilà, nous dit-il, ce que, pendant quinze jours, les habitants de Pagny ont mangé comme pain. Et encore quand on en avait ! »
Enfin ce fut l'apparition des premières patrouilles prussiennes. Leurs soldats arrivaient dans les rues, s'emparaient du premier habitant rencontré, lui mettaient le fusil sur la poitrine en criant : «  De la viande ». Si l'on faisait mine de ne pas comprendre, ils tiraient un chargeur de leur cartouchière, en disant :
- «  Voilà pour toi. »
Beaucoup d'entre eux savaient le français, mais affectaient de ne parler que l'allemand. C'est ainsi qu'après avoir conduit de la viande hors de la ville, à un endroit indiqué, un des Allemands dit a un habitant :
- «  Toi, tu es un bon zigue (sic); voilà pour toi. »
Et il lui fit cadeau de deux petites saucisses.
Tout en nous racontant les nombreuses incursions des Allemands, notre ami nous fait ainsi le récit de la capture du premier prisonnier allemand. C'était un fantassin. Il était en extrême pointe des siens lorsque survinrent nos chasseurs qui étaient encore à près de deux cents mètres. Plusieurs habitants s'approchèrent. L'un d'eux lui mit la main sur l'épaule en disant :
- «  Il faut choisir. Là (en indiquant les Allemands), ici (en montrant les Français) ».
Le fantassin n'eut pas une seconde d'hésitation. Il se tourna vers nos chasseurs.
Une voiture se trouvait à proximité. L'Allemand y fut rapidement poussé et, quelques minutes après, il était remis à nos soldats.
Nous parlons ensuite du bombardement de Pagny. La réponse est peu banale, bien qu'on l'ait déjà entendue.
«  Les obus allemands ne causent pas grands dégâts. C'est, déclare notre interlocuteur, de la véritable camelote, comme tout ce qu'ils font. »
Et pour bien nous montrer que rien n'est plus exact, il nous raconte que voyant tomber un obus dans un jardin, il s'y rendit après l'éclatement.
«  - L'obus, dit-il, avait fait un trou dans la terre, où l'on aurait pu à peine enterrer une lessiveuse, avait tapissé les parois, mais sans entrer dans la terre qui était pourtant toute molle.
«  Du reste, la mitraille des obus tombés dans la ville n'a fait qu'effleurer le crépi - des murs, sans faire le moindre dégât à la maçonnerie.
«  Chaque jour ce sont des escarmouches dans la ville ou aux environs. Les Prussiens pénètrent sur notre territoire. Nos chasseurs répondent par des feux de salve.
Mais nous ne pouvons voir le résultat de nos coups de feu, car les Allemands, qui se font suivre de nombreux fourgons, ramassent aussitôt ceux des leurs qui tombent à terre, les portent dans les voitures. De sorte que l'on ne peut dire s'ils sont morts ou blessés.
Cependant, dans les champs d'avoine, on voit un certain nombre de chevaux tués, ce qui fait présumer que leurs cavaliers doivent être tués aussi. On ne le saura que lorsque l'on ira faire la moisson des avoines. Mais quand ?
«  La canonnade aurait recommencé dans la journée de lundi et les Allemands auraient anéanti la ferme du Bel-Air, située sur la rive droite de la Moselle.
«  Ils auraient également fait sauter le pont de l'écluse du canal. Je n'ai pu m'assurer de ces faits, car j'ai quitté Pagny peu après pour venir à Nancy chercher de la farine et des approvisionnements pour les habitants. »

A travers les rues
DE NANCY

Nancy, 19 août.
Nos rues sont toujours pleines d'animation.
Comme il y a beaucoup de désoeuvrés, il y a naturellement beaucoup de flâneurs pour discuter sur la nationalité des avions, qui nous survolent et sur le moyen le plus efficace de ne pas rater les aéroplanes ennemis.
On entend des stratèges qui n'ont jamais tenu un fusil ni lu une carte géographique, exposer d'admirables plans de bataille, à rendre des points à un conducteur d'armées.
Il faut convenir cependant que la majorité de ces habiles tacticiens est assez modeste pour admettre que jusqu'ici «  ça ne va pas mal du tout ».
D'autres se contentent de jouir du spectacle de la rue et ne se fatiguent pas les méninges à échafauder des mouvements tournants.
Ils applaudissent lorsque passe quelque convoi de matériel pris aux Allemands, par exemple des fusils abandonnés sur le champ de bataille, ou bien tendent le poing lorsque, derrière la portière d'une auto, ils aperçoivent un officier ennemi prisonnier.
On doit rendre cette justice à la foule qu'elle garde son sang-froid et ne se livre pas à des manifestations déplacées.
Et puis, malgré l'inquiétude qu'on éprouve pour ceux qui sont partis, et dont les nouvelles sont rares - ont-ils seulement du papier pour écrire, nos braves soldats ? - on a le coeur joyeux des succès quotidiens annoncés par les dépêches officielles et plein d'espérance dans l'issue finale du duel gigantesque si avantageusement commencé.

A JARNY
LABRY
DONCOURT

Nancy, 19 août.
Un voyageur, revenu de Metz, mais arrêté depuis dix jours près de Jarny, est arrivé ce matin. Il a bien voulu nous conter comment les Allemands avaient opéré leur entrée dans ce pays, qui ne compte pas moins de 5.000 habitants, et où s'exploitent des mines nombreuses.
«  Dès mon arrivée, je vis des patrouilles tant à Jarny qu'à Labry, où le gouvernement a fait dernièrement construire de nombreux baraquements.
Le lendemain, trois chasseurs ayant rencontré, à la sortie de la ville, une patrouille de neuf cyclistes montés sur des machines volées à Doncourt, les attaquèrent, en tuèrent quatre du corps d'armée de Francfort, et mirent les autres en fuite.
Pour venger leurs camarades, une centaine de cavaliers allemands arrivèrent. Ils menacèrent de mettre le feu à la ville, mais ils se contentèrent de piller la mairie, de détruire les archives, de voler la caisse ainsi que celle du receveur buraliste, et un officier, arrachant de son cadre le portrait du président Poincaré, le mit en morceaux, cracha dessus, le piétina et en dispersa les morceaux en ricanant.
- Le président ! Il n'existe plus ! Dans huit jours, nous serons à Paris.
Et après avoir pillé la poste, détruit les appareils, ils s'en retournèrent, emmenant en otage le maire, M. Henri Génot, et prévenant les habitants qu'ils auraient quotidiennement à leur apporter au cantonnement 100 bouteilles de vin bouché, 200 litres de vin ordinaire et 1.200 litres de bière.
«  A la mairie, où l'on soignait plusieurs de leurs blessés, ils violentèrent les femmes de la Croix-Rouge et frappèrent à coups de baïonnette les infirmiers.
«  Le service de ravitaillement n'existe pas chez eux. Ils crèvent littéralement de faim et manifestent la joie la plus exubérante quand ils peuvent trouver quelques victuailles.
«  Les officiers ignorent tout ce qui se passe en Europe et leur plus grande préoccupation quand ils pénètrent dans un pays est de savoir s'ils peuvent y trouver des journaux ou si quelque habitant a reçu des lettres apportant des nouvelles de l'extérieur.
«  A Jarny, Labry et aux environs, ils ont conseillé aux habitants de faire la moisson.
Dès que les chariots furent chargés d'épis dorés, ils s'en emparèrent et les expédièrent à Metz, où la population manque du nécessaire.
«  Le 16, entre Doncourt et Jarny, ils s'approchèrent d'une cantine où logent des Italiens travaillant aux mines, et sous prétexte - ce qui ne fut nullement prouvé - que l'un d'eux avait tiré un coup de revolver, ils en fusillèrent seize. C'est ainsi qu'ils pacifient le pays. »

LE CAPORAL PRUDHOMMEAUX

Paris, 19 août.
Le caporal aviateur Prudhommeaux est nommé sergent.
On sait que le caporal Prudhommeaux seul à bord de son avion, de même que le lieutenant Césari, était parti de Verdun avec mission de reconnaître et de détruire, si possible, le hangar de dirigeables à Metz, sur lequel il put lancer sa bombe.

LE DOSSIER DES ALLEMANDS

Nancy, 19 août.
Les Allemands ont renouvelé le bombardement de Pont-à-Mousson où ils ont visé une usine métallurgique qui fonctionne encore ; il importe de relever cette singulière façon d'agir des troupes allemandes.
Un article du règlement de la Haye décide que le bombardement d'une ville ouverte ne peut avoir lieu que si les autorités civiles ont été avisées de cette opération militaire. Or, les Allemands ont à deux reprises négligé de prendre cette précaution.
Cette atteinte au droit des gens est d'autant plus grave que la question du bombardement des villes ouvertes a fait l'objet de graves et sérieuses discussions à la conférence de la Haye, et les représentants de l'Allemagne ont non seulement adhéré aux décisions prises, mais ils y ont apposé leur signature au nom de leur pays.
Cette violation nouvelle de toutes les règles internationales fait en ce moment, au ministère des affaires étrangères français, l'objet d'une étude attentive, et il paraît vraisemblable que notre gouvernement dénoncera ces faits aux gouvernements étrangers.

Des Aviateurs allemands
SUR PONT-A-MOUSSON

Pont-à-Mousson, 19 août.
Mardi, vers dix heures du matin, des aviateurs allemands, qui depuis un certain temps survolaient la ville, ont lancé plusieurs bombes qui, heureusement, n'ont pas fait de victimes.
L'une de ces bombes est tombée sur la fabrique de cordages Wilm. Après avoir percé la toiture, le projectile traversa un plafond et éclata en faisant un trou de 2 mètres de diamètre dans le plancher.
Les dégâts sont peu importants.
Une autre bombe tomba dans un jardin, à proximité des cités de Boozeville, à 25 mètres à peine de l'habitation du gérant.
Aucun dégât.
Leur exploit accompli, les aviateurs allemands s'enfuirent à tire-d'ailes, en essuyant les coups de feu de nos troupes.

LES ALLEMANDS
achèvent les blessés et tuent les enfants

Paris, 19 août.
Dans la région de Belfort, un grand nombre de prisonniers ont été traités avec la dernière sauvagerie. Les Allemands les ont déshabillés, poussés en avant de leurs lignes en les exposant presque nus aux balles françaises. Ils en ont jeté d'autres dans le canal, pour les en retirer et les y rejeter encore.
Un de nos blessés, aujourd'hui en traitement à Besançon, a été frappé à la tête et dans les côtes à coups de crosse et de talon. Un soldat allemand l'a traîné sur le sol. A côté de lui, un autre blessé français a été achevé à coups de baïonnette.
Quelques officiers ont essayé de retenir leurs hommes. Ils n'ont pas su se faire obéir.
Enfin, à Magny, un enfant de sept ans, s'amusant à mettre en joue une patrouille, avec un fusil de bois, a été fusillé sur place.

Les Allemands civils d'Alsace tirent sur nos troupes.
Dans diverses localités de la Haute-Alsace. lès immigrés ont tiré (devant Mulhouse, notamment). A Cernay, une section déployée devant l'ennemi a perdu trente-huit hommes, tous atteints dans le dos : les coups de feu avaient été tirés du village, avant qu'aucun soldat, allemand y eût pénétré.
A Lutrau, l'instituteur a tiré sur une patrouille de cavalerie, tuant deux chevaux.

LE MAIRE DE BADONVILLER

Paris, 19 août.
Voici le texte du décret publié par le «  Journal Officiel » nommant M. Benoît (Joseph-Edmond), maire de Badonviller, au grade de chevalier dans l'ordre national de la Légion d'honneur :
«  Conduite héroïque dans l'exercice de ses fonctions.
«  A la suite des actes de sauvagerie et des meurtres commis par les soldats allemands dans sa commune, sa femme ayant été assassinée et sa maison incendiée, il a, avec un sang-froid et une fermeté admirables, continué à assurer, sans défaillance, la protection et la sécurité de la population.
«  A sauvé, par la suite, la vie d'un prisonnier allemand menacé par la juste colère des habitants, donnant ainsi un magnifique exemple d'énergie et de grandeur d'âme. »

POUR NOS AMIS BELGES

Nancy, 19 août.
M. L. Mirman, préfet de Meurthe-et-Moselle, a demandé par télégramme et obtenu du ministère de l'intérieur une subvention de 3.000 fr. qu'il a fait immédiatement parvenir à la Société belge de bienfaisance. Cet acte de solidarité, au lendemain du jour où les soldats belges viennent d'être assimilés par la loi aux soldats français en ce qui concerne l'assistance aux soutiens de famille appelés, engagés ou rappelés sous les drapeaux, est un nouveau témoignage de l'admiration et de la gratitude de la nation française pour la vaillance de la noble Belgique.

EN ALSACE-LORRAINE
Progrès dans la Haute-Alsace, - Les Allemands reprennent Villé, mais les Français occupent Château-Saline, Dieuze, et s'avancent jusqu'à Delme et Morhange

Communiqué, du ministère de la guerre 19 août, 23 heures En Alsace, la situation est sans grande changements.
Nous continuons toutefois à progresser en Haute-Alsace.
Les Allemands ont repris Villé, dans les Vosges, où nous avions une avant-garde.
Les troupes françaises débouchent sur la Seille, occupant. Château-Salins et Dieuze.
Mais la progression est forcément très lente devant des organisations fortifiées solidement tenues.
L'armée française a atteint Morhange.
Les Français ont progressé rapidement au delà de la Seille, dans la partie centrale.
Ils ont atteint, à la fin de la journée, Delme d'un côté, Morhange de l'autre.
Sur le front, rien de nouveau en Alsace en Lorraine.

LES LETTRES ATROCES

Paris, 19 août, 1 heure (Visé).
Les troupes françaises ont saisi de nombreuses lettres de soldats allemands provenant de Badonviller, à quelques kilomètres de la frontière.
Dans plusieurs de ces lettres, les Allemands disent qu'ils ont fait soixante kilomètres en France.
Une autre lettre dit : «  Nous serons à Paris à la fin du mois. »
Dans une troisième, on lit cette phrase : «  Nous sommes au sud de la France. »
La plupart de ces lettres injurient les soldats français.
Il convient de remarquer que les soldats allemands qui écrivent ces lettres reculent depuis quatre jours devant les troupes françaises.
Les soldats allemands déclarent qu'ils ne manquent pas d'argent, qu'ils en obtiennent sous la menace du revolver.
Avant d'incendier les villages, les Allemands emportent tout ce qui est buvable ou mangeable.
Un autre écrit que la première ville rencontrée après la frontière fut complètement détruite.
Tous les Français appartenant à la population civile étaient fusillés, s'ils avaient seulement une mine suspecte ou malveillante. On fusillait tous les hommes, les jeunes garçons non adultes.
Dans une lettre, un soldat allemand affirme avoir vu passer trois convois de paysans français prisonniers.
«  Tous seront fusillés », écrit-il.
Dans une autre lettre, se trouve cette phrase : «  Nous fusillâmes des habitants de quatorze à soixante ans. Nous abattîmes trente pièces.
Vingt-autres lettres portent constamment ces phrases : «  Tout fut fusillé. On tue tout. Nous ne laissons aucun habitant vivant, sauf les femmes. »
Cette fureur est motivée par l'accusation que des civils ont tiré des coups de feu sur les soldats allemands, et que le gouvernement français leur a fait distribuer des armes et des munitions.
Tout le monde, même en Allemagne, sait que cela est faux.
Les lettres saisies indiquent que de nombreux réservistes allemands moururent sur les routes par suite de la forte chaleur.
Un régiment bavarois engagé dans la région de Blâmont a subi des pertes colossales.

UN AÉROPLANE ALLEMAND
au-dessus de Nancy

Nancy, 20 août
Mardi à 5 heures après-midi, un monoplan allemand a survolé Nancy. Il est arrivé du côté de Jarville et a suivi à peu près la ligne du chemin de fer en traversant Nancy.
A la sortie de notre ville, au moment où le monoplan se trouvait entre la côte de Boudonville et le plateau de Malzéville, une fusillade nourrie éclata sur les hauteurs. Immédiatement le monoplan fit volte-face et rebroussa chemin en suivant la même route qu'à son arrivée.
A peu près au-dessus de la gare, il s'éleva rapidement et disparut dans les nuages qui, depuis quelque temps, arrivaient de l'horizon et qui le cachèrent à la vue.

L'HORREUR ALLEMANDE

Paris, 20 août, 0 h. 48.
Les rapports des autorités françaises sur la conduite des Allemands continuent à signaler de nombreux actes de brutalité injustifiés des Allemands sur la population civile dans les communes de la frontière, meurtres des habitants, incendies de maisons, etc.
Un général de brigade signale qu'un hussard français fait prisonnier a été égorgé par des soldats allemands devant les habitants d'une commune d'Alsace, qui en ont témoigné.
(Communiqué.)

PREMIER AVEU

Paris, 20 août, 1 h. 25.
DE STOCKHOLM. - Les agences allemandes continuent à envoyer des informations dont il convient de relever la suivante :
«  Les Allemands avouent l'échec de Schirmeck, et déclarent que le succès français serait dû à la connivence de la population civile. (Visé.)

Une Locomotive de Sarrebourg

Lunéville, 20 août.
Les Lunévillois ont eu, mercredi, un délicieux frisson de joie patriotique lorsqu'ils ont vu arriver à la gare une locomotive et plusieurs fourgons venant de Sarrebourg, ce qui tend à prouver que cette ville est occupée par nos troupes. Un artiste qui porte actuellement le fusil avait dessiné à la craie un portrait fort ressemblant de M. Poincaré, sur l'avant de la locomotive, décoré de verdure et d'un trophée de drapeaux.
Du côté de l'Alsace tout va pour le mieux.
Nos troupes ont canonné, mercredi, nous assure-t-on, Mutzig.
Nos douaniers sont déjà installés en Alsace et l'on s'occupe depuis deux jours à organiser dans toutes les localités reconquises les services administratifs.
Dans ce but, M. le Sous-Préfet de Saint-Dié, accompagné de M. Schmitt, député, s'est rendu mercredi à Saales.

SAUVÉS !

Paris, 19 août, 1 heure matin.
Le maire et les notables de Blâmont avaient été condamnés à mort par les Allemands. L'arrivée rapide des troupes françaises en provoquant le désordre et la retraite allemande, leur sauva la vie.

Une lettre touchante
A NOS SOLDATS
A NOS OFFICIERS

Nous recevons la lettre suivante que nos soldats, nos officiers liront avec le coeur plus encore qu'avec les yeux :
Nancy, le 20 août 1914,
Monsieur le Directeur de l'«  Est Républicain »,
Monsieur,
Nous sommes prêtes à faire pour nos maris, pour leurs frères d'armes, tout ce qu'il nous sera humainement possible de faire. Il y a quelques jours vous nous avez demandé pour eux du papier à lettre, peu de chose en somme, et vous nous assurez que par vos soins il sera distribué. Nous avons confiance en vous, il n'en faut pas davantage pour que nous nous précipitions, de tout notre coeur, vers vous, vous priant d'être notre intermédiaire pour tout ce que réclameront nos maris, nos chers aimés, ainsi que leurs frères auxquels nous voudrions également. prouver notre sincère affection. C'est bien le moins qu'on leur fasse voir, que, de loin comme de près, on les aime ardemment.
Si je vous demande comme une prière cette obligation, c'est que je suis persuadée que votre obligeance est inlassable pour tout ce qui touche à nos braves soldats français ; ensuite c'est aussi parce qu'une grande confusion va infailliblement se produire dans le cerveau de ces chers êtres auxquels nous devons tant d'heures de joie et de bonheur et qui nous ont quittées si confiants dans l'amour absolu que nous avons pour eux. Cette confusion est que plusieurs d'entre nous reçoivent souvent des lettres de leur mari, lettres remplies de tendresses, mais accompagnées de sensibles reproches de ce que nous paraissons les oublier alors qu'ils auraient plus que jamais besoin de notre affection et de notre soutien moral ! Notre coeur d'épouse et d'amante ne saurait qu'être ému à l'excès, devant ces reproches Immérités.
Pour ma part, voici la «  septième » lettre que j'adresse à mon cher mari, que j'adore de toutes les forces de mon être, depuis trois semaines qu'il m'a quittée, et la dernière lettre que je reçois de lui (ce matin même) est, cette fois, remplie d'amers reproches m'accusant de ne plus l'aimer et d'être contente peut-être qu'il est parti se faire tuer.
Je vous fais grâce, Monsieur, de tout ce que j'ai souffert en lisant cette lettre.
J'étais courageuse jusqu'aujourd'hui, je vous prie de le croire, j'aurais tout bravé.
Cependant, je sens ce courage m'abandonner devant cette situation que ma raison se refuse à admettre comme m'étant dévolue personnellement. Quantité d'autres jeunes femmes subissent cette alternative cruelle. Nous souffrons toutes, car, toutes, nous changerions volontiers de place avec eux pour leur prouver que nous ne les avons jamais tant aimés qu'en ces jours de terrible angoisse.
Jamais leur vie ne nous a été plus précieuse et notre inquiétude est plus grande à cette heure où ils nous accusent amèrement d'indifférence envers eux. Ils souffrent de ne rien savoir de nous, au point de se montrer injustes, mais nous souffrons bien davantage encore de l'impuissance dans laquelle nous nous trouvons bien malgré nous de ne pouvoir nous justifier.
Pourquoi donc, Monsieur le Directeur, nos maris ne reçoivent-ils pas nos lettres ? Pourquoi, puisque l'Administration des postes nous en a promis la circulation et la distribution avec seulement un retard de 48 heures ? Faites-lui donc savoir, à cette puissante interprète d'amour, que nos maris ont absolument besoin de nouvelles de leur foyer qu'ils ont abandonné si bravement, sans défaillance, avec l'espoir apaisant qu'ils pourraient communiquer avec nous. Et ils ne reçoivent rien !. Dites donc à cette Administration que ce n'est pas seulement un devoir, mais une nécessité qui s'impose pour elle, si elle veut que le courage de nos braves soldats se maintienne en équilibre.
Nos lettres à nos maris, Monsieur, c'est le baume puissant et régénérateur à la lutte âpre et démoralisante qui s'engage chaque jour. Assurez-lui aussi, à cette Administration, que les lettres que nous leur envoyons ne contiennent que des paroles répondant à la fière et digne attitude de Françaises que nous sommes et que nous voulons demeurer toujours, quoi qu'il advienne.
Aucune lamentation, aucune plainte ne va vers ceux que notre chère et belle France à appelés dans les plis de ses drapeaux ! Rien que du courage, de la patience et de l'espoir ! Si nous avons des larmes en secret, elles sont pour nous seules, tandis qu'à ceux que nous aimons si entièrement nous n'envoyons que des sourires et des baisers : puissant réconfort moral pour le coeur de l'homme.
J'ose espérer, Monsieur le Directeur, que vous prendrez notre cause avec toute la chaleur qu'elle comporte et dont nous vous savons capable. Je vous le répète. Nous avons confiance en vous, pleine confiance et resterons pour la vie vos obligées.
Merci beaucoup, beaucoup, d'avance. Merci aussi pour l'affection bien française que vous nous donnez chaque jour en exemple, à nous et aux nôtres bien loin là-bas. Ils se le rappelleront, allez, et leur reconnaissance s'ajoute déjà à la nôtre.
Veuillez croire, Monsieur le Directeur, à l'expression de notre profonde et cordiale sympathie.
UNE FEMME D'OFFICIER.
La vaillante petite Française qui nous écrit avec une si ardente, une si touchante confiance a mille fois raison. Malheureusement, il ne semble pas possible que l'administration des postes, qui a tant à faire actuellement pour collaborer à la défense de la Patrie, fasse mieux et plus vite.
Nous publions pourtant cette lettre parce qu'elle montre à quel héroïsme simple s est élevé tout naturellement le coeur de nos Françaises.
Et aussi pour que nos soldats, nos officiers sachent bien, - par le journal, puisqu'ils reçoivent si irrégulièrement les lettres de celles qu'ils aiment et qui les aiment, - que loin de les oublier, leurs mères, leurs épouses, leurs soeurs n'ont de plus chère, de plus profonde, de plus constante pensée que pour les défenseurs de la Patrie.
R. M.

EN ALSACE
Mulhouse repris à la baïonnette

Paris, 20 août, 13 h: 40.
Les troupes françaises ont réoccupé Mulhouse, après un vif combat à la baïonnette.

Paris, 20 août, 17 h. 15.
C'est après un combat très vif, où nos troupes durent enlever à la baïonnette un faubourg de cette ville, que nous avons réoccupé Mulhouse.
Six canons et six caissons sont restés entre nos mains.

Nous occupons aussi Guebwiller
Aux cols des Vosges, notre situation demeure la même.
Nous avons toutefois occupé Guebwiller.

EN LORRAINE
D'un côté à Sarrebourg de l'autre à Delme

Paris, 20 août, 15 h. 55.
Notre ligne s'étend du nord de Sarrebourg jusqu'à Delme, en passant par Morhange.

Une contre-attaque allemande

Paris, 21 août, 23 heures (visé).
La journée fut moins heureuse en Lorraine que les précédentes.
Les avant-gardes françaises se heurtèrent à des positions très fortes, et furent ramenées, par une contre-attaque, sur le gros des troupes françaises, solidement établies sur la Seille et sur le canal de la Marne au Rhin.

LES
Allemands en retraite
SUR LE RHIN

Paris, 21 août, minuit 58 (visé).
Les troupes françaises ont remporté de brillants succès entre Mulhouse et Altkirch.
Les Allemands sont en retraite sur le Rhin.
Ils ont laissé entre nos mains de nombreux prisonniers.
Nous avons pris 24 canons, dont 6 au cours de la lutte engagée par l'infanterie française.

Paris, 21 août, 1 h. 05 (visé).
BELFORT, 20 août. - Le combat qui s'est livré dans les environs de Mulhouse, a été particulièrement meurtrier pour les Allemands, qui, sachant que les Français épargnent le plus possible les Alsaciens et leurs propriétés, se dissimulèrent dans les maisons protégées par la Croix-Rouge, d'où Ils tirèrent sur les Français.
Ceux-ci dirigèrent un feu violent d'infanterie et d'artillerie sur les assaillants, dont ils firent un véritable, carnage.
Tous les Allemands qui sortaient des maisons furent tués.
Une batterie de six pièces, avec ses caissons remplis de projectiles, fut enlevée à l'ennemi.
Ces canons ont été amenés aujourd'hui à Belfort.
Une foule considérable a défilé devant.
Dix-huit autres canons, pris dans la matinée, sont attendus à Belfort demain, avec une colonne de six cents prisonniers.

A NOMENY
Le récit de Mlle Jacquemot. - Les Prussiens ! - Dans la cave. - Arrosées de pétrole. - Le feu. - Soldats et officiers, - Les soldats pleurent. - Dans les champs. - La fusillade. - Vers Mailly. - En l'absence des chefs. - Quelques maisons restent debout. - Ce n'est pas l'heure de la pitié

Nancy, 21 août
Les nouvelles que de pauvres gens de Nomeny chassés par les Allemands de leur cité saccagée et brûlée ont répandues dans les rues de Nancy ont ému la population.
On serait ému pour bien moins, car nos ennemis ne respectent aucune loi, et paraissent se complaire aux ruines et aux meurtres.
Mais les Lorrains ne tarderont pas retrouver le sang-froid qui est la forme le plus virile du courage. A cette heure même ils ont reconquis, dans leur juste colère la calme énergie que la situation rend nécessaire.
Ils comprennent que l'incendie de Nomeny et les assassinats qui l'ont accompagné, les Allemands les ont voulus pour agir par la terreur sur la population lorraine. Le trouble n'aura duré qu'un moment. On s'est ressaisi.
Il faut bien se dire que ceci n'est pas un fait d'armes, mais un horrible fait-divers, La perte de Nomeny n'a en rien entamé nos positions. Chacun sait qu'on ne pouvait point défendre cette ville, et qu'en effet on ne l'a point défendue.
Les Allemands ne se sont pas comportés en soldats, mais en bandits.
Ce ne sont point des troupes qui ont combattu, mais des sauvages qui se sont rués sur des vieillards, des femmes, des enfants sans armes.
Gardons notre pitié pour les victimes, mais gardons aussi notre courage pour le véritable combat, celui où les Allemands armés trouveront des Français armés.
Il ne faut pas avoir seulement confiance dans la victoire définitive. Tout nous donne la certitude que, cette épreuve passée, la France triomphera. Elle a pour elle la droit, la volonté, l'enthousiasme patriotique, et aussi les armements solides et les solides positions.
Que les coeurs s'apaisent, que les yeux restent secs. Ce n'est pas l'heure de la pitié qui amollit, c'est l'heure de la décision.
RENÉ MERCIER.

Nomeny n'est plus, car le peu qu'il en reste désormais ne saurait empêcher que l'on puisse écrire sur ses ruines : «  Ici fut Nomeny. »
Les Prussiens y sont entrés, jeudi, 20 août, incendiant, pillant, massacrant tout.
Il faut se ressaisir et se cuirasser de tout son courage pour écrire toutes les horreurs que les rescapés, arrivés à Nancy vendredi matin, à peine vêtus, les yeux encore épouvantés, nous ont racontées.
Une des survivantes, Mlle Jacquemot, au service du docteur Viller, a été accueillie par M. Bergeret, qui l'a réconfortée autant qu'il est possible en d'aussi douloureuses circonstances. C'est chez lui que nous avons pu l'interviewer.
Mlle Jacquemot est une jeune fille de vingt ans, originaire de la Lorraine annexée. Ses-yeux sont agrandis par la terreur de tout ce qu'elle a vu, par tout ce qu'elle a souffert. Elle a été surprise, en pantoufles, en tenue de travail, et c'est ainsi qu'elle est arrivée, avec, pour tout linge; dans un panier, un fichu. Les larmes tombent sans cesse le long de son visage, mais elle a tant pleuré qu'elle ne s'aperçoit plus qu'elle pleure.
C'est un récit entrecoupé de sanglots qu'elle nous fait. Rien ne saurait être plus éloquent, plus pathétique. Nous transcrivons simplement ses paroles :
«  Hier matin, jeudi, vers 10 heures, nous dit-elle, j'étais en train d'écrire à ma patronne - car Mme Viller et ses deux enfants sont heureusement à Houlgate, depuis que M. Viller a été mobilisé - lorsque j'entends crier dans la rue.
«  Je sors.
«  - Les Prussiens ! Les Prussiens ! Sauvez-vous dans les caves !
«  Craignant un nouveau bombardement, je rentre pour ouvrir les fenêtres et fermer les persiennes, ainsi qu'il avait été ordonné
«  Puis je décide de ne pas rester seule et, ainsi qu'il avait été convenu avec une voisine, je descends dans la rue pour me rendre chez elle.
«  Je n'ai que le temps de rentrer. Des cavaliers, des fantassins prussiens, hurlant, sabre au clair, revolver au poing, arrivent de tous les côtés.
«  Capout ! Capout ! Tous les Français capout ! » crient-ils.
«  Je passe par la grange et, par le derrière des habitations, j'arrive enfin chez ma voisine.
«  D'autres personnes y sont déjà venues. Nous sommes quatorze.
«  Nous descendons aux caves. Il y en a trois. Des deux premières on a malheureusement oublié les clefs et nous ne sommes pas assez robustes pour en enfoncer les portes.
«  Enfin, nous réussissons à ouvrir la troisième, et, toutes tremblantes, nous nous réfugions dans un coin.
«  Par le soupirail, nous entendons la canonnade et la fusillade Des tuile tombent. C'est un vacarme infernal.
«  Enfin, le canon se tait. Combien de temps avait-il tonné ? Aucun de nous ne peut s'en rendre compte.
«  Mais on entend des pas dans l'escalier. Nous arrive-t-il des sauveurs ou bien des assassins ?
«  Ce sont des Prussiens. Nous nous serions dans un coin sombre... Les Prussiens entrent. Ils n'ont pas de lumière.. Ils s'avancent. Ils regardent. Ils ne nous aperçoivent point.
«  Ah ! qui dira jamais quelles minute nous avons vécues !...
«  Sommes-nous enfin sauvées ?. Hélas ! Non.
«  Les Prussiens sont remontés, mais c'est pour nous arroser de pétrole, par le soupirail. Ils mettent le feu. On étouffe. On va mourir, brûlées ou asphyxiées.
«  L'odeur du pétrole est insupportable. Ils ne l'ont pas ménagé.
«  On ne peut rester là. Il faut sortir à tout prix. Mourir pour mourir, mieux vaut mourir d'une balle ou d'un coup de baïonnette.
«  Quelqu'un de nous a une montre. Il regarde. Il est cinq heures. Il y avait sept heures que nous étions là !.
«  Une «  paire » de jeunes filles - car, avec les femmes, il n'y avait que quelques enfants et des vieillards - une «  paire » de jeunes filles se dévouent.
«  - Vous en étiez ?.
e- Oui. Nous sommes sorties trois, les deux demoiselles Nicolas et moi.
«  Nous sortons du côté de la remise... Tout brûle dans Nomeny. Toute la rue est en flammes. Il ne faut pas songer à sortir du côté de la rue.
«  Où aller...
«  L'un dit : Allons par ici ; l'autre :Allons plutôt de ce côté-là.
«  De tous les côtés, devant, derrière, tout flambe. Nous n'avons plus qu'un espoir, c'est d'essayer de gagner les champs.
«  Nous entrons dans le premier jardin venu. C'est celui de Mlle Manoncourt. Or, c'est un enclos, et nous n'arrivons pas à défoncer la porte.
«  Soudain, nous entendons parler allemand derrière notre mur. Des soldats prussiens l'escaladent. Cette fois, nous croyons bien que, pour de bon, notre dernière heure est venue.
«  Or, le premier Prussien qui apparaît nous crie :
«  - Fourt !! Fourt ! Allez-vous-en ! Sauvez-vous »
«  Mais, je vous l'ai dit, nous ne pouvons pas ouvrir la porte.
«  Enfin, les Prussiens nous rassemblent et nous emmènent. En route, d'autres viennent nous rejoindre. Nous arrivons dans une houblonnière. Il y a des postes qui refusent de nous laisser passer.
«  Nous revenons à Nomeny, vers le pont.
«  Nous supplions de nous laisser passer.
«  - Nous sommes des femmes ! Ayez pitié de nous.
«  On refuse.
«  Enfin, après bien des supplications, on nous emmène à l'infirmerie installée chez M. Zambo.
«  Là, les soldats sont gentils. Ils nous consolent. Ils nous disent que ce sont leurs officiers qui les forcent à incendier - et à fusiller.
«  L'un des soldats nous parle en français.
«  - Je suis Lorrain, moi aussi, dit-il. Je suis de Novéant. J'ai une mère...
«  Il pleurait.
«  En traversant les rues en flammes, nous avons vu des morts et des morts. Il y en avait qui avaient la tête fendue. Une vieille femme, qui allait avoir ses cent ans au mois de novembre, est tombée d'épuisement pendant le trajet Bien sûr qu'elle est morte.
«  A l'infirmerie Zambo, on nous a donné du pain et un peu de charcuterie. Nous avons couché par terre, et ce matin, vendredi, vers 6 heures, on nous a fait déguerpir.
«  - Etiez-vous nombreux ?
«  - Oh ! un cent. Cent vingt peut-être. Peut-être cent cinquante. Avec une autre colonne qu'on m'a dit être partie d'un autre côté, c'est tout ce qui restait de vivant à Nomeny.
«  - Ils n'ont pas emmené d'otages ?
«  - Je ne sas pas si c'est pour les garder comme otages ou pour les fusiller, mais ils ont ramassé tous les hommes, depuis les vieillards jusqu'aux gamins de 15 ans.
«  Ceux-là, je ne sais pas ce qu'ils sont devenus. J'ai entendu dire qu'ils en avaient fusillé beaucoup sur la place, mais je ne l'ai pas vu.
«  Nous voici dans la rue. Un officiel nous demande où nous voulons aller.
«  Comme personne ne savait trop que répondre, on nous emmène du côté de Mailly, c'est-à-dire vers la frontière.
«  Nous marchons environ deux kilomètres, escortés par des soldats, et nous constatons que Mailly n'est pas brûlée.. Puis l'on nous fait rebrousser chemin.
«  Nous voici de nouveau à Nomeny.
«  Nouvel ordre. On repart. On nous fait faire cinq fois cette navette. Nous n'en pouvons plus.
«  Enfin, la sixième fois, lorsque nous arrivons au moulin de Brionne, les soldats allemands nous abandonnent.
«  - Allez où vous pourrez ! nous dit l'un d'eux, en français. Vous êtes libres.
«  Nous avons suivi la route.
«  De temps en temps, nous nous retournions pour regarder une dernière fois notre pauvre Nomeny. Ma maison n'existait plus, et l'une des seules maisons qui restaient, la pharmacie, ne formait plus qu'un brasier énorme.
«  Nous arrivons enfin à Lixières. Là, des ambulances françaises nous recueillent, et c'est ainsi que nous sommes arrivés à Nancy, où, pour mon compte, vous le voyez, je suis tombée chez de si braves gens.
«  Je peux aller rejoindre ma patronne, à Houlgate.
«  - Dans deux ou trois jours, - interrompt M. Bergeret, lorsque vous vous serez bien reposée ici.
«  - Avez-vous quelques noms de victimes, noms dont vous soyez bien sûre.
«  - J'ai vu des morts dans les rues, mais on n'avait guère le temps de les regarder de près.
«  Cependant, je crois avoir reconnu M. Quillian père, qui gisait sur la chaussée, la tête fendue.
, «  On m'a dit aussi que Mme Humbert, en ouvrant sa porte en compagnie de ses enfants, s'était trouvée face avec les Prussiens, qui tiraient des coups de revolver. Mais je ne sais pas si elle a été tuée, ni si les enfants sont saufs.
«  Ce qu'il y a de terrible, c'est de songer que beaucoup de ceux qui s'étaient enfermés dans les caves ont pu périr brûlés vifs ou asphyxiés.
«  En tout cas, je vous le répète, deux colonnes seulement de 100 à 120 personnes sont parties, et une colonne de vieillards, de jeunes gens et d'enfants a été emmenée je ne sais où, ou fusillée... »
Tel est le récit, aussi sincère qu'émouvant, que nous avons entendu du sac de Nomeny.

Sur la place Stanislas, vendredi matin, vers 10 heures, un groupe compact d'hommes et de femmes, le visage anxieux, entoure plusieurs femmes et jeunes fillettes, venant de Nomeny, qui se serrent peureusement auprès d'elles. Une jeune femme raconte les souffrances qu'elle et sa famille ont endurées pendant la journée de jeudi.
«  J'habite Paris, que j'ai quitté pour venir voir mes parents à Nomeny où j'étais depuis quatre jours.
«  Dans la journée de mercredi, je me trouvais dans les vignes où je travaillais avec ma mère. Je m'avançai un peu. Tout à coup, j'aperçois, à dix mètres devant moi, un soldat allemand.
«  Je courus de suite dans la direction du cimetière, où se trouvait un poste de soldats français, et je le prévins que les Prussiens arrivaient
«  Quelques coups de feu furent échangés, puis la journée se termina sans autre alerte.
«  Jeudi matin, vers 10 heures, la canonnade éclata soudain au-dessus de Nomeny., On entendait les obus tomber sur les maisons, défonçant les toits et mettant le feu aux habitations.
«  Tout le monde se retira dans les caves où l'on resta enfermé jusqu'à vers quatre heures ou cinq heures du soir.
«  A ce moment, comme on entendait les murs des maisons s'écrouler sur les voûtes, l'on craignait d'être ensevelis et l'on se décida à sortir des caves pour aller chercher un refuge dans la campagne.
«  En passant, à travers les rues, on vit les maisons qui s'écroulaient ; l'église, la maison d'école, transformée cependant en ambulance, étaient incendiées.
«  Partout, l'on était obligé de passer au-dessus de corps étendus sur la chaussée.
Les Prussiens fusillaient tous les hommes.
«  Devant une fillette, ils tuèrent un homme de 74 ans et un autre de 40 ans. Je pris par la main la malheureuse enfant et je l'emmenai avec moi.
«  La voici, nous dit notre interlocutrice, en montrant une fillette âgée d'une douzaine d'années. Elle pourra en témoigner.
«  Les soldats allemands avaient pris tous les hommes qu'ils trouvèrent dans la ville. Ils les conduisirent sur la place de l'Hôtel-de-Ville, et là, devant les femmes et les enfants, ils les fusillèrent à bout portant.
«  J'ai vu tomber, notamment, le boucher et d'autres habitants.
«  Nous nous sommes sauvés dans les vignes.
«  Bientôt les obus allemands venaient tomber autour de nous. Ils éclataient dans le sol, nous couvrant entièrement de terre.
«  Puis le feu cessa. Les Prussiens vinrent nous rejoindre.
«  C'est alors que j'ai vu un homme tomber à terre, frappé par une balle prussienne. Sa femme s'étant baissée pour le relever, un soldat allemand lui posa le canon sur la tête. La malheureuse s'écroula sur le corps de son mari.
«  Puis les Allemands prirent tous les un hommes qui étaient avec nous. Ils les emmenèrent vers Mailly.
«  Les femmes et les enfants furent repoussés ensuite sur la ville.
«  Nous avons passé le pont, où se trouvaient des cadavres.
«  A l'extrémité de la ville, il a fallu rebrousser chemin, puis repasser le pont. Enfin, on nous conduisit à la maison Zambo, que les Prussiens avaient conservée pour leur servir d'ambulance.
«  Les soldats allemands nous donnèrent à manger du pain et ce qu'ils avaient avec eux. Quelques-uns, qui parlaient français, nous plaignirent.
«  Ils étaient bons pour nous. J'ai vu l'un d'eux prendre un petit enfant qu'une femme portait dans ses bras, l'entourer dans une couverture et le remettre à sa mère.
«  Vendredi matin. à six heures, nous avons été réveillés. Les mêmes soldats nous donnèrent à boire, et nous réconfortèrent.
«  Ils agissaient ainsi lorsque les chefs étaient absents, car ceux-ci se montraient particulièrement méchants, et leurs soldats tremblaient devant eux.
«  En sortant de la maison Zambo, on nous fit aller sur Mailly, puis on nous ramena jusqu'au pont du moulin de Brionne.
«  Là, des soldats nous obligèrent à rebrousser chemin. Il fallut revenir vers Mailly, puis vers Brionne. On fit ce manège-là plusieurs fois. Je crois que les chefs voulaient nous montrer le spectacle des ruines de Nomeny.
«  Enfin, on nous ramena une dernière fois vers Brionne. Là, les soldats allemands nous abandonnèrent.
«  Nous nous sommes dirigés vers Pont-à-Mousson, et bientôt on rencontrait des Français, qui, après avoir entendu notre récit, nous apportèrent quelques secours. Puis des voitures d'ambulances vinrent nous chercher et nous amenèrent à Nancy »

L'HORREUR ALLEMANDE

ancy, 21 août
Il fallait s'y attendre de la part de vandales dignes d'Attila. Les Allemands ont renouvelé leurs exploits de Nomeny dans tous les villages environnants, notamment Eply, Clémery, Port-sur-Seille.
Port-sur-Seille n'existe plus.
Champey n'a pas été incendié, mais des affiches en allemand ont été placardées dans les rues, pour prévenir les habitants qu'au premier coup de feu le village serait brûlé.

PRISONNIERS ALLEMANDS
amenés à Belfort

Belfort, 21 août
On vient d'amener ici 563 soldats et sous-officiers et 15 officiers des régiments d'infanterie badoise qui ont été faits prisonniers hier à Dornach, près de Mulhouse. On en attend un convoi pareil dans la journée de demain. Ils seront tous dirigés sur le Centre.
Parmi les otages pris à Mulhouse, on signale le directeur et le caissier de la succursale de la Reichsbank.

DANS LES COMMUNES ÉPROUVÉES
L'invasion des Barbares. - Les Allemands vole et, pillent, tuent, brûlent. - Ruines et meurtres. - La bête teutonne déchaînée. - Un Maire héroïque. - Le poteau-frontière de Deutsch-Avricourt au musée de Nancy. - Vive la France.

Nancy, 21 août
M. L. Mirman. préfet de Meurthe-et-Moselle, s'est rendu hier à Badonviller pour remettre la croix-de la Légion d'honneur M. le maire Benoit.
M. le Préfet était accompagné comme dans toutes les visites déjà faites par lui dans l'arrondissement si éprouvé de Lunéville, par M. Méquillet, député, et Minier, sous-préfet.
Il était cette fois accompagné aussi de Mme Mirman. laquelle avait en ce jour une mission spéciale à remplir : celle de porter, au nom de toutes les femmes de France, un souvenir ému aux femmes francises assassinées par les Allemands et de déposer sur ces tombes des gerbes de fleurs nouées de rubans tricolores. Ce pieux pèlerinage auquel, en chaque commune, se joignirent les autorités locales, eut lieu :
1° A Badonviller. sur la tombe de Mme Benoit, femme du maire, fusillée alors qu'elle ouvrait, sur les ordres des autorités allemandes, les fenêtres de sa maison.
2° A Badonviller, sur la tombe provisoire, en plein champ, où reposent les restes de Mme George et de son mari, fusillés dans leur maison même avec une atroce cruauté ;
3° A Bréménil, sur la tombe de Mme Barbier, brûlée dans sa propre maison, et qui y fut d'abord probablement assassinés au chevet de son fils, blessé et alité dont les restes furent aussi retrouvés dans les décombres ;
4° A Blâmont, sur la tombe de Mlle Cuny, tuée dans les champs près du village et sur qui les Allemands tirèrent comme sur une alouette..
Tel est, dressé jusqu'à ce jour, le martyrologe des femmes françaises en cette région de Lunéville.
A Badonviller, pendant que le pieux pèlerinage s'accomplit sur les tombes de Mmes Benoit et George, la foule s'est massée sur la place Un officier commandant des troupes de passage, avisé de la cérémonie qui va avoir lieu, commande un piquet pour rendre les honneurs. M. le Préfet de Meurthe-et-Moselle s'exprime en ces termes :
«  Je viens, au nom de la France, saluer à Badonviller la commune martyre et le maire héroïque.
«  Ici, les barbares ont donné toute leur mesure. Sans la moindre provocation, sans qu'un coup de feu ait été tiré, une menace faite, une insulte proférée, une imprudence commise par la population civile, disciplinée sous l'autorité ferme et sage de son maire, sans la moindre raison, sans le moindre prétexte de guerre, ils ont ici accumulé toutes les violences possibles. Ils ont emmené quinze otages, dont à l'heure actuelle aucune nouvelle ne nous est connue. Ils ont saccagé, ils ont pillé, ils ont volé, volé non seulement les liqueurs dont ils s'enivrèrent, mais l'argenterie et les bijoux. Ce n'est pas tout. Avec calme, méthode et sang-froid, se servant de cartouches et fusées spéciales ils ont brûlé huit maisons. Ce n'est pas tout encore. Quand ils se retirèrent, leurs artilleurs situés sur une commune voisine, virent devant eux la belle église de Badonviller, magnifique cible plus facile à atteindre et moins dangereuse à viser qu'une batterie française.
Alors qu'il n'y avait pas un seul soldat français dans l'église, dans le village ni aux alentours, leurs artilleurs canonnèrent, démolirent et incendièrent l'église : on eût dit que ces Bavarois, les plus catholiques parmi les Allemands, avaient conçu l'extravagante idée de vouloir punir Dieu de n'avoir pas béni leurs armes ! Ce n'est pas tout encore hélas ! Plus de dix personnes; dont deux femmes, furent lâchement assassinées.
«  Tel est le bilan de ruines et de meurtres. Si je n'étais entouré d'enfants qui pleurent les pères ou mères fusillés, j'éprouverais une âpre joie à dresser ce tableau tragique et je dirais : Oui, il fallait que quelque part en une commune de France marquée pour ce martyre - et cette commune devait être en Lorraine - il fallait que le barbare imprimât la marque totale de son génie, qu'il offrit au monde un échantillon de ce qu'il sait faire : qu'il fit comprendre par quelque exemple éclatant ce dont est capable la bête teutonne quand elle est déchaînée.
«  Je viens, mes chers amis, d'abord vous dire ceci : cette bête teutonne que vous avez vue à l'oeuvre, elle ne reviendra jamais sur notre terre de France. Sur toutes les parties du monde elle est traquée, traquée au Sud par la race vaillante des Serbes et Monténégrins qui n'ont pas reculé d'une semelle, traquée à l'Est par les Russes qui avancent, traquée au Nord-Ouest par les Belges héroïques qui leur apprennent en ce moment ce dont est capable un peuple fier et libre ; elle est traquée, la bête teutonne, sur tous les Océans et sur tous les continents du monde par les Anglais ; de Liège à Belfort, elle recule ; près d'ici, sous les baïonnettes françaises, elle a été chassée des cols et des sommets des Vosges, elle dévale en hurlant de rage dans les plaines d'Alsace ; bientôt, pantelante, elle repassera le Rhin, la bête teutonne contre laquelle se dressent, avec une mâle énergie. toutes les nations du monde qui veulent vivre dans la paix, le travail et la bonté. Elle est traquée, vous dis-je, plus d'angoisse ! Oubliez vos épreuves, garder le souvenir impérissable de vos chères victimes, dont les noms seront inscrits bientôt en lettres d'or sur des plaques de marbre dressées aux portes de vos mairies, mais relevez la tête, et contemplant ce destin supérieur à nos espérances, à l'aurore de cette ère nouvelle où la Patrie rayonnante va imposer au monde le règne de la Justice, pleurons de joie en acclamant la douce France éternelle !
«  Mais le spectacle de ces ruines fumantes m'impose le devoir : habitants de Badonviller et des communes éprouvées de Lorraine, je prends devant vous un double et solennel engagement ; d'abord vos maisons vous seront rendues, reconstruites au frais du pillard et de l'incendiaire ; puis vos églises seront restaurées et si elles doivent l'être par souscription publique, je prends l'engagement, au nom de ma race dont je connais bien l'âme, qu'à cette souscription pas un Français ne manquera, catholique ou libre penseur, protestant ou, Israélite, puisque tous aujourd'hui forment contre le barbare comme un bloc de ciment armé.
«  Il me reste une mission à accomplir. »
M. L. Mirman rappelle la conduite héroïque du maire Benoit ; il insiste sur les vertus morales dont il a fait preuve lorsque, le lendemain, il a sauvé, par sa courageuse intervention, la vie d'un prisonnier allemand. Il met en relief le magnifique exemple qu'il a donné et dont la France est fière. Et aux acclamations enthousiastes de toute la foule, il épingle sur le modeste veston du maire Benoit la croix de chevalier de la Légion d'honneur.

Après une courte visite à Bréménil et à Blâmont, M. le Préfet de Meurthe-et-Moselle s'est rendu à Nonhigny, où un affreux, spectacle l'attendait. Sur 60 maisons, 15 et les plus importantes sont brûlées, l'église en ruines, quatre hommes assassinés, dont l'adjoint faisant fonctions de maire, M Jeanjean. M. Mirman réunit les quelques hommes valides présents dans le village ; sur leur indication, désigne M. Gérard Arsène pour faire fonction de maire, distribue les secours d'extrême urgence, donne des indications sur le ravitaillement en farine et diverses autres questions d'intérêt immédiat, et fait, par M. le juge de paix du canton, présent sur les lieux, adresser un secours à la commune de Parux, également bouleversée, visitée déjà antérieurement.
La commune voisine de Barbas est moins éprouvée. Deux hommes tués, cinq otages emmenés. Maisons pillées, mais aucune incendiée. Il est entendu que la population de Barbas va aider les habitants plus malheureux de Nonhigny.
A Remoncourt, le maire, M. Scherer, et M. Beaudoin, conseiller municipal, ont été emmenés comme otages et ne sont point revenus. Pas d'assassinat. Pas de maison incendiée. Mais le village est à sac. L'adjoint Chatel se multiplie. La population pleure de joie en apprenant les bonnes nouvelles, en écoutant les paroles réconfortantes que lui apporte M. le préfet de Meurthe-et-Moselle.
A Xousse, trois maisons brûlées, un otage emmené. Xousse, où il reste quelques vieux chevaux, ira se ravitailler en farine pour son compte et pour Remoncourt.
Vaucourt offre comme Nonhigny un spectacle de désolation : une trentaine de maisons incendiées, incendiées non comme l'église par le bombardement et par accident de guerre, mais incendiées à la main, froidement, comme à Badonviller. Trois otages emmenés. Le village est à sac. La population réunie sur la place, au milieu des ruines, accueille les déclarations du préfet par une acclamation unanime de «  Vive la France ! », et sur ces visages éprouvés coulent aussi des larmes de joie et de fierté. Il est entendu qu'on fêtera l'an prochain, dans un banquet, l'inauguration des nouvelles maisons reconstruites aux frais des barbares.
M. le préfet a visité en rentrant à Nancy les municipalités de Xures et Einville, et était à 7 heures à la mairie de Nancy, où Mme Mirman faisait connaître à M. le maire Laurent qu'elle était heureuse d'apporter et d'offrir à la ville ce Nancy, le poteau-frontière allemand de Deutsch-Avricourt. M. Paquel sortit avec peine de l'auto la lourde et vilaine masse de bronze et la remit à M. le maire, qui se propose de la faire déposer ultérieurement au musée de la ville.

LA JOURNÉE MUNICIPALE

Nancy, 21 août 1914.
Les récits d'horreurs commises par les Allemands ont rendu la population impressionnable. En outre, la vue des blessés, celle de malheureux paysans, affolés, les sentiments bien compréhensibles que ceux-ci éprouvent, mais qu'ils expriment d'une manière excessive, en termes qui grossissent de bouche en bouche, tout cela contribue à augmenter la sensibilité générale Il ne manque pas, cependant, à Nancy, de gens capables de donner l'exemple du sang-froid. Les habitants de notre ville sont familiarisés avec l'idée de guerre. Ils doivent donc montrer du calme et, surtout, «  conseiller le calme ».
Conseiller du calme autour d'eux et dans l'ambulance où l'on fait trop parler les blessés. Ces derniers sont déprimés, enfiévrés, ils n'ont vu que le coin du combat où mal leur advint. Naturellement, ils envisagent les choses avec amertume, avec tristesse.
Leurs récits ne sauraient donc trouver créance chez les gens sérieux. On en peut dire autant des récits faits par les automobilistes chargés du transport des blessés. Ces excellents auxiliaires n'ont vu que les horreurs du champ de bataille, ils en restent frappés et communiquent à leurs auditeurs un dégoût, une appréhension contre quoi l'opinion publique doit être mise en garde.
Nous n'avons pas à nous occuper ici des opérations. Mais les habitants de Nancy ont déjà pu apprécier avec quelle méthode elles sont menées. Notre confiance dans les chefs militaires est inébranlable. Pour conserver notre sang-froid, il suffit que nous nous gardions nous-mêmes contre les amplifications, les commérages, les exagérations de tout genre qui naissent passagèrement sous les pas de chacun. L'excellent esprit de la population est un sûr garant qu'il en sera ainsi.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Nancy, 21 août 1914, 18 heures.
M. le lieutenant-colonel Ducasse, major de la garnison, prie M. le maire de Nancy d'inviter la population à faire preuve de calme.
Il ne faut pas que quelques coups de canon et la fuite des gens de la campagne suffisent pour alarmer une population comme celle de Nancy, qui est couverte par toute une armée

SUR LE FRONT

Paris, 21 août.
Des forces allemandes ont continué de passer la Meuse aux environs de Huy et une concentration importante est en voie d'exécution en Belgique.
Il est agréable de constater que ce matin il n'y avait plus aucun point du territoire français occupé par l'ennemi, sauf une légère enclave à Audun-le-Roman.
Ainsi, le vingtième jour de la mobilisation, en dépit de toutes les assurances allemandes, des écrits de leurs auteurs les plus connus et de ceux même du grand état-major, non seulement ils n'ont pas encore obtenu les avantages décisifs qu'ils escomptaient, mais encore ils n'ont pu porter la guerre sur notre territoire.
Cet avantage, dont il convient d'ailleurs de ne pas s'exagérer outre mesure l'importance, a néanmoins une valeur morale qu'il est bon de signaler.
(Officiel.)

LES OPÉRATIONS EN LORRAINE ET EN ALSACE
Sur le front, du Donon jusqu'à Château-Salins. - Delme, Dieuze et Morhange. -
Nancy est couvert. - Ne soyons pas inutilement imprudents. - Succès français.
- Thann et Dannemarie. - Le général Pau. - Vers Colmar et Neuf-Brisach. -
Dornach à la baïonnette. - Les Allemands passent le Rhin en désordre.

Paris, 22 août.
Nous avons annoncé, d'après des dépêches son maires, que nos troupes avaient réoccupé Mulhouse et que nos Groupes de Lorraine, devant un ennemi supérieur en nombre, s'étaient repliées.
On trouvera ci-dessous les détails sur ces deux séries d'opérations :
En Lorraine, nos troupes se replient. On sait qu'après avoir reconquis la frontière, nos troupes s'étaient avancées en Lorraine.
Sur tout le front du Donon jusqu'à Château-Salins, elles avaient refoulé dans la vallée de la Seille et la région des étangs les troupes allemandes. Nos avant-gardes avaient atteint Delme, Dieuze et Morhange.
Dans la journée de vendredi, plusieurs corps d'armée allemands ont engagé, sur tout le front, une vigoureuse contre-attaque.
Nos avant-gardes s'étant repliées sur le gros, le combat a commencé, extrêmement vif de part et d'autre.
En raison de la supériorité numérique de l'ennemi, nos troupes, qui se battaient depuis six jours sans interruption, ont été ramenées en arrière.
Notre gauche couvre les ouvrages avances de Nancy, notre droite est solidement installée dans le massif du Donon.
L'importance des forces ennemies engagées ne nous eût permis de nous maintenir en Lorraine qu'au prix d'une imprudence inutile.
Les détails arrivés samedi sur l'occupation de Mulhouse montrent que nos troupes y ont obtenu un gros succès L'offensive d'abord sur le front Thann et Dannemarie, ensuite sur Mulhouse, a été menée avec une extrême vigueur par un mouvement audacieux Le général Pau, une fois maître de Thann et Dannemarie, a porté ses troupes à l'ouest de Mulhouse, laissant à l'ennemi la liberté de s'engager entre nos lignes et la frontière suisse.
Puis, par un deuxième effort, les Allemands ont été rejetés sur Mulhouse. En même temps que notre droite se portait sur Altkirch, notre gauche s'était avancée dans la direction de Colmar et de Neuf-Brisach, menaçant la ligne de retraite de l'ennemi.
Les Allemands ont été alors contraints d'accepter le combat, qui a été des plus chauds.
Dans un faubourg de Mulhouse, à Dornach, notre infanterie a enlevé à la baïonnette canons et fait plusieurs milliers de prisonniers.
La lutte s'est poursuivie dans les rues, de maison à maison.
Les pertes des Allemands sont énormes. Continuant son succès, une partie de notre armée a occupé Mulhouse, tandis que tout le reste se rabattait sur Altkirch et forçait les Allemands à se replier sur le Rhin, qu'ils ont passé en désordre.
Ainsi est atteint le but initialement fixé à nos troupes dans la Haute-Alsace : le rejet des forces allemandes sur la rive droite du Rhin. (Officiel.)

A CHATEAU-SALINS

ancy, 22 août
Nous avons reçu ce matin la visite d'une haute personnalité de Château-Salins, qui nous a conté la prise et L'occupation de Château-Salins.
- Je ne sais guère plus quel jour on vit. Mais enfin il y a quatre ou cinq jours les Français ont occupé Château-Salins, où leur artillerie a fait merveille. Les Allemands fuyaient tant qu'ils pouvaient.
«  L'enthousiasme de la population était émouvant On accueillait vos soldats avec des vivats et des hourras.
«  Un commandant cependant le lendemain nous réunit :
- Il se passe, nous dit-il, à Château-Salins quelque chose d'ignoble. Nous comprenons qu'on nous tire dans la poitrine.
Mais nous ne pouvons pas accepter qu'on nous fusille dans le dos. Or, des coups de feu nous ont été envoyés par la population.
«  Nous avons protesté avec indignation. Ce n'était pas possible. Nos sentiments, nous ne les dissimulons pas assez, malgré le danger qu'il y a de les divulguer, pour que tout le monde ne les connaisse.
- Je ferai une enquête, nous déclara le commandant, qui comprit que notre protestation partait du coeur.
«  Et en effet l'enquête a été faite, et on a amené à Nancy une fonctionnaire allemande, purement allemande, dans le lit de laquelle on a trouvé un fusil chargé, et qui avant la mobilisation bénissait la guerre prochaine.
«  Par tout le pays que j'ai parcouru, notre situation, votre situation, veux-je dire, est excellente. Je suis venu à Nancy, accueilli par les soldats français, et je vous assure que je suis largement, pleinement rassuré sur notre avenir français, sur notre avenir à nous, Lorrains annexés, qui voyons déjà la délivrance. »

LES MANoeUVRIERS DE LA PEUR

Nancy, 22 août.
Puisque les parties de manille sont désorganisées et que les matches de billard sont interrompus, on ne peut pas empêcher les gens de jouer un autre feu, le jeu de la manoeuvre. Evidemment tous les esprits sont dirigés vers la partie énorme qui est ouverte, et dont la paix européenne est le formidable enjeu.
Mais il faut que nos concitoyens sachent bien ceci : c'est qu'ils ne savent rien.
Ils ne connaissent ni le nombre de nos hommes, ni le nombre de nos ennemis. Ils ne connaissent ni les positions des Français ni les positions des Allemands. Ils ne connaissent ni le plan de notre état-major ni le plan de l'état-major prussien.
Pour avoir vu des soldats qui passent dans la rue, qui partent, qui reviennent, ils n'en sont pas plus avancés sur ce que font nos troupes, ni les troupes opposées.
Et s'ils ont entendu le rapport du sous-chef cuisinier de la quatrième, ils n'ont pas du coup acquis assez d'autorité ni assez de précisions pour établie ce qu'on devrait faire.
Persuadons-nous que nous sommes doublement incompétents d'abord parce que nous n'avons pas étudié la situation générale, ni la situation particulière, ni la situation quotidienne et changeante, et ensuite que si nous avions étudié tout cela, ce serait la même chose. Nous n'en saurions pas davantage.
Alors conservons, si nous voulons, cet amusement qui consiste à jouer au manoeuvrier. Mais gardons aussi notre sang-froid, et un scepticisme souriant sur la valeur de nos hypothèses de fantaisie.
Et puis, et puis surtout, arrêtons sur les lèvres des mauvais prophètes les paroles imprudentes ou énervantes, et ne craignons pas de leur dire tout net qu'ils commettent une action abominable en détruisant la confiance qu'à bon droit la population a placée en nos armées.
Il ne faut pas craindre d'être sec, et de répondre aux semeurs de panique - Vous avez peur. Vous ne savez pas ce que vous dites.
Faites cela, mes chers amis, trois ou quatre fois dans la journée, et vous verrez que vous-mêmes serez soulagés, en même temps que vous aurez agi en bons Français.
RENÉ MERCIER.

Et l'État de Siège ?

Nancy, 22 août.
L'autorité militaire a pris vendredi une mesure excellente : elle a ordonné la fermeture des cafés à 6 heures. Il y a actuellement en ville un grand nombre de soldats inoccupés ou légèrement blessés qui sont autorisés à quitter l'hôpital une ou deux heures par jour. Depuis quelques jours, on les attirait dans les cafés, à l'heure de l'apéritif, on les accueillait, on les entourait, on les questionnait. Et. de la sorte, les bruits les plus fantaisistes prenaient corps, les nouvelles les plus invraisemblables circulaient, répandues ensuite par des civils qui affirmaient les tenir «  d'un soldat qui y était ». On a voulu mettre fin à tous ces potins. On a bien fait...
Mais il reste beaucoup à faire. On ne se doute pas, en effet, que Nancy est en état de siège et que les rassemblements y sont interdits.
Promenez-vous sur un pont, un de ces ponts gardés par des sentinelles. Vous pensez que le public «  circule ». Non ! Il bavarde, il forme des groupes.
Passez au Point-Central, ou au coin des principales rues. La circulation y est à peu près interrompue par la foule des oisifs et des désoeuvrés. Et les groupes sont des foyers de fausses nouvelles, ou de bruits inquiétants.
Vendredi, place Stanislas, c'était bien pis. On ramenait les habitants de Nomeny fuyant devant l'incendie. Il eut été bon de les diriger Immédiatement, sans tapage, sur des refuges ou des établissements hospitaliers. On les a laissé descendre de voiture place Stanislas, devant l'Hôtel de Ville. Ils se sont partagés en petits groupes qu'ont immédiatement entourés des milliers de personnes. La place fut vite couverte de monde. Et tout ce monde se répandit ensuite par la ville, y semant une terreur exagérée.
Enfin, les convois de blessés donnent lieu à des manifestations de curiosité regrettable. Nous avons vu des gens attendra tout une après-midi, rangés sur les trottoirs, en files serrées, le passage des convois. Le premier rang s'assied sur la bordure du trottoir, les autres s'étaient par derrière. On se croirait au retour des courses. Les abords des hôpitaux sont de même encombrés.
Nous pensons qu'il y aurait le plus grand Intérêt à remédier d'urgence à un état de choses qui ne peut qu'augmenter sans raison l'énervement du public et jeter dans les esprits le trouble et la démoralisation..
Tous les gens sérieux et réfléchis applaudiront à l'exécution sévère des prescriptions relatives à l'état de siège.

Habitants de Nancy

Nancy, 22 août 1914.
Commandant les troupes opérant dans votre région, je fais appel à votre bonne volonté, à votre calme, à votre patriotisme dans les circonstances que nous traversons.
Ne prêtez pas l'oreille aux bruits alarmants qui circulent.
Mes troupes et moi nous sommes là, comptez sur nous.
Signé ; Général Léon DURAND.

FEMMES DE FRANCE

Nancy, 22 août.
L'Union des Femmes de France possédait, à Cirey et à Blâmont, des hôpitaux en voie d'organisation. M. Lespine, délégué régional, a pu les visiter, accompagné de M. Breittmayer, envoyé du siège central de Paris, apportant du matériel de pansement et des instruments, en même temps que deux médecins désignés par le service de santé, à la demande de M. la préfet.
Ces hôpitaux se sont organisés et ont pu fonctionner.
A Blâmont, Mme Florentin et ses collaboratrices ont pu hospitaliser plus de 150 malades et blessés et cette femme au grand coeur soignait des Allemands tandis que son mari, adjoint au maire, et pour lequel d'ailleurs elle trouvait le temps d'intercéder, était retenu comme otage et à la veille d'être fusillé.
A Cirey, une autre femme admirable, Mme Mazerand, aidée de ses concitoyennes, recevait 3 à 400 blessés dans son hôpital criblé de balles allemandes, et sous la commandement de majors allemands qui s'étaient emparés de la direction.
Tout cela à Blâmont et à Cirey, au milieu des fusillades éclatant dans les rues.
A Badonviller, aidée par les dévoués brancardiers, l'Union des Femmes, de France put, grâce principalement à Mme Fenal, aux religieuses de la Doctrine Chrétienne, au docteur Bauquel, à sa fille, improviser un hôpital et des secours et recevoir de 6 a 700 personnes.
Cette attitude de nobles Françaises, attitude au-dessus de tout éloge, réconforte quand on passe au milieu de toutes ces ruines, de ces villages sauvagement incendiés, de ces églises démolies par l'ennemi.
Aussi, le délégué régional de l'Union prie-t-il la presse de bien vouloir, en insérant cette note, y joindre l'expression publique de sa respectueuse admiration qui sera, croit-il, le sentiment de toute notre population.

SUR LE MARCHE

Nancy, 22 août.
Sur le marché de la place Mengin, les denrées de toutes sortes étaient en abondance. On peut dire même que rarement l'on a vu choux, salades et haricots en pareilles quantités. Il y avait aussi de nombreuses charpagnes de mirabelles.
Tout était à des prix tout à fait abordables. Depuis de longues années, les produits de nos banlieues n'avaient atteint un bon marché pareil.
Aussi nos prévoyantes ménagères ont-elles fait de grosses provisions pour confitures et pour conserves, car ce sont là des dépenses qui sont, en réalité, une économie.

LES BEAUX GESTES

Nancy, 22 août.
M. L. Mirman a reçu, pour être remise à M. le maire de Bréménil, la somme de 200 francs de M. Thiébault, conservateur, des hypothèques à Oran.
M. Thiébault a une maison dans la commune de Bréménil. «  Est-elle, écrit-il, parmi les maisons incendiées ? Je le saurai plus tard. Mais il y a là de pauvres gens et qui souffrent et je ne sais comment adresser à quelqu'un de la localité la somme contenue dans cette lettre pour aider à leurs misères. »
La lettre et les 200 francs seront transmis à M. l'adjoint de Bréménil, le maire, blessé d'une balle à l'épaule, étant soigné à l'ambulance de Cirey.

COMBATS EN ALSACE
Violentes attaques contre nos positions de Mulhouse.
Les Allemands repoussés.

Bâle, 22 août, 5 heures du soir.
Pendant les trois journées qui viennent de s'écouler, les Allemands ont fait des efforts énergiques pour déloger les troupes françaises de leurs positions autour de Mulhouse. Plusieurs attaques vigoureusement menées, ont été repoussées. Des convois de blessés qui arrivent continuellement attestent les ravages terribles que cause dans les rangs allemands l'artillerie française, installée sur les hauteurs d'Altkirch. On entend d'ici ses gros canons.
Hier soir, à dix heures, nous avons pu voir une attaque de nuit tentée par des troupes venant d'Istein Nous voyions le combat engagé entre les Français établis sur les hauteurs et les grosses pièces de forteresse.
Au-dessus des lumières de Bâle, les puissants projecteurs de Baden éclairent les positions françaises.

Bâle, 23 août, 11 h. 50 matin.
On télégraphie de Delle que les Allemands font de nouveaux préparatifs d'attaque contre les positions françaises, qui sont solidement occupées.

LES OPERATIONS EN LORRAINE
L'offensive allemande est arrêtée. - Pas d'attaque au centre. - Sur les hauteurs de Lunéville. - Les pertes

Paris, 23 août, minuit 55.
(Officiel.)
L'offensive allemande qui avait répondu à notre attaque et continué pendant la journée d'hier, a été arrêtée aujourd'hui.
Il ne s'est produit aucune attaque allemande contre la position désignée sous la nom de «  Grand Couronné de Nancy »
Des engagements ont eu lieu sur les hauteurs au nord de Lunéville.
On a l'impression que dans ces actions, l'attaque des Allemands a été molle.
Il est certain que si nos pertes au cours de ces trois jours derniers ont été sérieuses, celles des Allemands l'ont été également.

Encore un «  Zeppelin » DÉTRUIT

Paris, 23 août, 16 h. 18 (Visé).
Le «  Zeppelin VIII » a été abattu sur la route de Celles à Badonviller. Il venait de Strasbourg.
Le «  Zeppelin » qui a été détruit était une des plus puissantes unités de l'armée aérienne de l'Allemagne ; il cubait 22.000 mètres ; il avait 156 mètres de long, 14 mètres 80 centimètres de large, avec un moteur de 800 chevaux. Il pouvait voyager à 80 kilomètres à l'heure. Son enveloppe était en aluminium.

SUR LES CRÊTES DES VOSGES
La zone neutre - Nous reprenons les cols du Bonhomme et de Sainte-Marie. - Entrain et souplesse. - On enlève un drapeau.

Paris, 23 août, minuit 35.
(Officiel.)
Un communiqué du gouvernement expose longuement, à propos des opérations dans les Vosges, que les Français ayant laissé une zone neutre de huit kilomètres entre eux et la frontière, les Allemands en profitèrent pour s'installer fortement sur les crêtes des Vosges que les Français durent reprendre.
La conquête des Vosges fut faite avec des effectifs au début très restreints, qui augmentèrent progressivement.
Les pertes françaises furent peu élevées, sauf aux cols du Bonhomme et de Sainte-Marie, où nous eûmes cinq à six cents blessés. Mais la canonnade infligea à l'ennemi des pertes six fois supérieures.
Au cours des opérations d'occupation des Vosges, les troupes françaises, complètement victorieuses, montrèrent l'entrain et la souplesse qu'exige la guerre de montagne.
Elles prirent à plusieurs reprises de l'artillerie de campagne et de l'artillerie lourde, et enlevèrent un drapeau.
Sur tout le front vosgien comme en Haute-Alsace, l'objectif proposé fut pleinement atteint.

CONSEIL MUNICIPAL DE NANCY

Séance extraordinaire du dimanche 23 août 1914, à 11 heures du matin
Election du Maire et de deux Adjoints
Etaient présents : MM. Schertzer, 1er adjoint ; Dorez, 3e adjoint ; Simon, 4e adjoint ; Souriau, adjoint ; Aubry, Barthélémy, Burté, Bussière, Charly, le docteur Chrétien. Devit, Evrard, François, le docteur Ganzinotti, Gros jean, Guyot, Michaut, Millery, Najean, Peltier, Prouvé, Vergne.
Absents au service de l'année : MM. Laurent, maire ; Maringer, adjoint ; Aerts, André, Chéry, Déon, Georgel, Gérard, colonel Lecomte. Liébeaut, Marchal, docteur Schmitt. En mission spéciale pour l'alimentation, M. Antoine.
MM. Joseph Laurent, maire, et Maringer, 2e adjoint, ayant été appelés à rejoindre leur poste à l'armée, il est procédé à l'élection d'un maire et de deux adjoints.
M. Gustave Simon, 4e adjoint, est élu maire par 20 voix sur 22 votants.
1 bulletin pour M. Michaut ; 1 bulletin blanc.

Election d'un 4e adjoint
M. Auguste Peltier, conseiller municipal délégué, est élu 4e adjoint, par 19 voix.
Les trois autres bulletins sont :
1 bulletin au nom de M. Michaut et 2 bulletins blancs.

Election d'un 5e adjoint
M. Emile Devit, conseiller municipal, est élu 5e adjoint par 18 voix.
Les 4 autres bulletins sont :
Un au nom de M. Millery et trois bulletins nuls.
Nancy, le 23 août 1914.
Le Maire : G. SIMON.

MM. Peltier et Devit
ADJOINTS

Le maire de la ville da Nancy, Vu le procès-verbal de la séance du conseil municipal en date de ce jour, dressé en exécution de la loi du 5 avril 1884 ;
Vu l'article 82 de la loi du 5 avril 1884 ;
Délègue:
M. Peltier, quatrième adjoint, pour diriger le service de la voirie municipale, des égouts, de l'éclairage public et de la distribution des eaux de sources et de Moselle.
M. Devit, cinquième adjoint, pour surveiller et maintenir l'exécution des lois et règlements en vigueur sur la police municipale et pour diriger les services de l'octroi et du cimetière.
MM. Peltier et Devit sont également délégués pour remplir les fonctions d'officier de l'état civil, en cas d'empêchement de M. l'adjoint Sauriau.
Nancy, le 23 août 1914.
Le Maire : G. SIMON.,

MAIRIE DE NANCY
M. le Maire de Nancy adresse aux habitants de Nancy la proclamation suivante :

Nancy, 24 août.
Mes chers Concitoyens, M. Laurent, maire de Nancy, lieutenant au 41e territorial, vient de rejoindre son poste à l'armée en remettant au Conseil municipal les fonctions dont il avait été investi. Grâce à son sang-froid, à son inlassable activité, M. Laurent a pu, dans les circonstances difficiles que nous traversons, assurer la vie matérielle, l'ordre, la sécurité morale de la cité.
Le Conseil municipal, après avoir, d'un accord unanime, rendu hommage aux services prodigués à la ville par M. Laurent, et en exprimant le voeu qu'il puisse reprendre sa charge dans un avenir prochain, a dû pourvoir à son remplacement. Il m'a désigné pour lui succéder comme maire de Nancy.
M. Maringer, 2e adjoint, commandant au 42e territorial, a dû aussi rejoindre son poste, après avoir jusqu'au dernier moment assuré son service municipal avec le plus inlassable dévouement.
Amené à pourvoir aux vacances ainsi produites dans la municipalité, le Conseil a élu M. Peltier 4e adjoint, et M. Devit, 5e adjoint.
Vous pouvez, mes chers concitoyens, compter sur mon dévouement le plus absolu et sur celui de mes collaborateurs pour poursuivre la tâche que M. Laurent avait assumée.
Avec l'appui de la population toute entière, mes efforts tendront à faire face aux difficultés de l'heure présente.
Le Maire de la Ville de Nancy
G. SIMON.

Lettre du Préfet

M. le Préfet vient d'adresser à M. Simon, élu ce matin maire de Nancy, la lettre suivante ; Nancy, 23 août.
Mon cher Monsieur le Maire, J'adresse un même salut fraternel aux deux maires de Nancy, celui d'hier et celui d'aujourd'hui.
Dans les circonstances si délicates où s'est trouvée la ville de Nancy pendant la période de mobilisation, M. Laurent a fait preuve des plus rares qualités d'organisation, de prévoyance, de décision et d'ordre. On lui doit cet hommage il a été digne de la noble tâche qui lui incombait, digne de l'assemblée municipale d'élite qu'il dirigeait, digne de sa grande et belle cité lorraine.
Officier de réserve en sursis d'appel, M. Laurent et M, l'adjoint Maringer ont estimé que leur devoir était de ne pas attendre plus longtemps pour se mettre à la disposition de l'autorité militaire. Ils sont aujourd'hui sous les armes. Ils savaient que, quelle qu'elle fût, leur décision serait critiquée par quelques-uns. Dans le doute, obéissant à leur conscience, ils ont été droit au feu. Ils ont droit au respect ému de tous les Français.
Votre tâche, M. le Maire, sera moins lourde que celle de votre prédécesseur. J'ai tout lieu en effet d'espérer, comme chaque Nancéien doit en avoir au coeur la foi profonde, que nous avons franchi la période la plus aiguë et que, grâce à l'admirable organisation de notre état-major et à la vaillance de nos troupes, l'horizon ne va pas tarder à devenir plus serein.
Moins lourde donc, je veux le croire, votre tâche sera bien complexe encore. En vous la confiant à l'unanimité de leurs suffrages, vos collègues vous ont décerné le plus enviable honneur. En l'acceptant en dépit de votre modestie, vous avez fait preuve d'un dévouement à la chose publique qui vous vaudra la gratitude de tous vos concitoyens.
Ai-je besoin de vous donner l'assurance que, pour vous en faciliter l'accomplissement, je vous apporterai mon concours à la fois le plus absolu et le plus cordial ?
Je vous serre la main, mon cher Monsieur le Maire, bien affectueusement.
MIRMAN.

La Journée du 23 août

Paris, 24 août
Les troupes de la Haute-Alsace, sur les Vosges et la Meurthe, commandées par le général Pau, tiennent le front précédemment indiqué, de Badonviller à Lunéville, et d'Amance à Dieulouard.
Nous avons contre-attaqué, hier, à quatre reprises, d'importantes positions, que nous occupons maintenant au nord de Nancy.
Nous Infligeâmes aux Allemands de très grosses pertes.

Dans les Vosges

(Communiqué officiel)
PARIS, 24 août. - Le ministère de la Guerre, dans sa note d'hier, à 23 heures, expose que la situation générale dans les Vosges nous détermina à ramener en arrière les troupes du Donon et du col de Saales.
Ces points n'ont pas grande importons, puisque nous occupons la ligne fortifiée commençant au Grand-Couronné de Nancy.
Lunéville a été occupé par les Allemands.

LES PRISONNIERS ALLEMANDS

La Morgue des Officiers
BELFORT, 24 août, 10 heures matin. - Un Important convoi de prisonniers allemands a été dirigé de Mulhouse sur le Centre, via Besançon.
Les officiers allemands font toujours preuve de la même morgue ; ils s'obstinent à ne pas monter dans les wagons avec leurs hommes.

ALLOCUTION DU
GÉNÉRAL PAU

BELFORT, 24 août. - Hier, sur la place d'Armes, en face du monument «  Quand Même », et devant les canons et le biplan pris à l'ennemi, le général Pau a remis la croix de la Légion d'honneur au capitaine aviateur Langlois, qui fut blessé au cours d'une reconnaissance en aéroplane.
Le général Pau, modifiant la formule habituelle, prononça les paroles suivantes : «  Au nom du gouvernement de la République et en vertu des pouvoirs qui me sont conférés, je voue nomme chevalier da la Légion d'honneur devant ces trophées pris à l'ennemi et vous donne l'accolade avec ce sabre pris à un officier allemand. »
La foule qui assistait à cette émouvante cérémonie éclata en applaudissements en criant : «  Vive la France ! »

L'Héroïsme économique

Nancy, 25 août.
Pendant que nos soldats se battent aux frontières, il est nécessaire de songer à la vie normale de la nation, et de reconstituer dans la mesure du possible le travail commun qui nourrit tous les enfants de France, qu'ils soient sous les armes, sous la redingote ou sous le bourgeron.
Au début de la guerre, toutes les énergies étaient dirigées vers la mobilisation. Cette opération préliminaire absorbait la pensée commune.
Puis, quand on a vu que tout marchait en ordre, que les convois apportaient régulièrement sur les points à défendre les soldats, les fusils et les munitions, les pouvoirs publics ont rétabli les moyens les plus favorables à l'approvisionnement de la population civile.
Cela aussi a été parfait. Nul dans notre pays, avec quelques économies, ou même sans un sou, n'a souffert de la faim.
Mais on ne peut pas vivre indéfiniment sous ce régime protecteur, ni sur les sommes que-péniblement on a mises de côté.
Le travail a été suspendu pendant assez longtemps. Il manque des hommes, il manque des chefs d'industrie, il manque des matières premières, des moyens de transport.
Malgré cette pénurie d'hommes et de matériaux, on peut pourtant organiser quelque chose, quelque chose de profitable à tous.
Les municipalités ont ouvert des chantiers. C'est très bien. Ce n'est pas assez.
Il faut que les commerçants, les industriels, les propriétaires fonciers s'appliquent à redonner du travail.
Evidemment il serait inconvenant de demander la reprise totale des affaires. Mais le crédit n'est qu'endormi. Qu'on le réveille !
La déclaration de guerre nous a porté un grand coup dans l'estomac. Nous n'avons même pas été étourdis par l'agression, mais nous nous sommes mis en posture de défense.
Il appartient maintenant aux bons citoyens de défendre économiquement le pays comme les soldats défendent matériellement le bien et l'honneur de France.
Nous connaissons de ces hommes qui, dès la première heure, ont merveilleusement organisé la vie économique dans la sphère de leur action. Ils ont ainsi, autant que les soldats, contribué à la défense de la Patrie.
Et ces hommes, qui ne portent pas le sac et le fusil, n'en sont pas moins des héros dans le sens le plus complet du mot. Ils ont non seulement le courage physique qui règle le sursaut des nerfs, mais le courage moral qui impose sa direction à la pensée vacillante, et la clarté aux conceptions que réclament les conditions nouvelles de la vie.
Nous avons des héros militaires, et nous sommes de tout coeur avec eux.
Que les héros civils se lèvent. Il y a de la besogne et de la gloire pour eux.
RENÉ MERCIER.

SUR LE FRONT
D'Anvers à Belfort
LA SITUATION GÉNÉRALE

Paris, 25 août, 15 h. M, - (Officiel).
Les Allemands semblent reprendre dans le Nord l'offensive arrêtée hier.
Ils sont contenus par les Français, en liaison avec les Anglais.
L'armée belge, sortant d'Anvers par surprise, refoula les premiers éléments allemands et dépassa Malines.
En Lorraine, après les contre-attaques d'hier, notre droite se replia sur la Mortagne, qui prolonge le cours de la Meurthe.
En Alsace, nous repoussâmes plusieurs contre-attaques allemandes dirigées sur Colmar.
Le bruit que les Allemands auraient repris Mulhouse est sans fondement.
A cette heure, le théâtre des opérations en Alsace devient, d'ailleurs, secondaire.

UNE LETTRE DU MAIRE DE NANCY

Nous recevons communication de la lettre suivante, que M. le Maire de Nancy adresse à M la Préfet.
Nancy, le 25 août 1914.
Monsieur le Préfet, Lorsque le maire et les adjoints nouvellement en fonctions, heureux de vous apporter l'assurance de leur entier dévouement, se rendaient à la Préfecture, ils ont eu le plaisir de vous rencontrer vous dirigeant à l'Hôtel de Ville, pour apporter à la nouvelle municipalité l'expression de votre bienveillant appui et de vos précieux encouragements.
Cette coïncidence dans l'expression de nos sympathies est significative ; elle marque bien l'entente parfaite qui s'est établie dès les premiers jours, par dessus les étiquettes et les protocoles, entre le Préfet de Meurthe-et-Moselle et la Municipalité de Nancy.
Votre fonction, telle que vous la concevez, est très haute, Monsieur le Préfet, Vous veillez à toutes les mesures d'assistance et d'hygiène qui s'imposent en ce moment, vous avez porté, de commune en commune, en même temps que la bonne parole, le réconfort de votre énergie et de votre ferveur patriotique.
Vous cherchez les conditions les meilleures pour accueillir et hospitaliser les malheureux réfugiés qui se pressent à nos portes : ainsi, malgré les difficultés provisoires de communication, de circulation, vous maintenez le lien de solidarité entre les membres épars et souffrants des populations lorraines, si durement éprouvées.
Notre tâche est plus localisée, mais, comme vous le dites, Monsieur le Préfet, combien complexe encore ! Tous nos efforts doivent tendre à faire vivre, dans la mesure du possible, Nancy de son existence normale, à empêcher qu'aucun des services indispensables à la vie d'une grande cité ne vienne à fléchir par insuffisance de personnel. Dans cette tâche, nous sommes aidés par le sang-froid, par la belle tenue morale de la population nancéienne, par le concours de toutes les bonnes volontés. Nous n'avons d'ailleurs qu'à continuer ce qui a été si bien instauré par M. Laurent.
C'est avec émotion que nous vous avons entendu, dans l'entretien que nous avons eu avec vous, Monsieur le Préfet, rendre un si bel hommage à l'oeuvre de celui que j'ai la lourd honneur de remplacer.
Nous qui l'avons aidé dans sa tâche, nous qui avons vu quelle somme de labeur il a donnée jour et nuit, depuis le début des hostilités, sommes persuadés que la population de Nancy lui restera reconnaissante de tant de vigilance et de dévouement.
Aussi, croyez, Monsieur le Préfet, que mes collaborateurs du conseil et moi, mettrons toute notre énergie pour accomplir avec votre appui, et en toute communauté d'action, la mission qui nous a été confiée.
Bien cordialement, cher Monsieur le Préfet, je vous serre la main.
SIMON.

A L'EST
Offensive combinée. - La bataille continue. - Dans la vallée de la Vezouze. - Très belle attitude des troupes. - Cruelle nécessité.

Paris, 26 août, 1 h. 30 matin.
(Officiel.)
Les deux armées de l'Est ont pris une offensive combinée, l'une partant du Grand-Couronné de Nancy, l'autre au sud de Lunéville.
La bataille s'est engagée hier.
Elle continue actuellement.
Le 15e corps, fortement éprouvé, s'est replié en arrière et reconstitué. Il participe à la bataille. Il a exécuté une contre-attaque très brillante dans la vallée de la Vezouze.
L'attitude de ces troupes est très belle ; elle montre qu'il ne reste aucun souvenir de la surprise du 20 août.

L'évacuation de Mulhouse
«  C'est une cruelle nécessité »
Le généralissime ayant besoin sur la Meuse, de toutes ses troupes, a ordonné d'évacuer progressivement la Haute-Alsace que nous avions occupée.
Mulhouse est évacuée.
L'action militaire entreprise entre Maubeuge et le Donon devant décider du sort de la France et de l'Alsace, le généralissime appelle pour une attaque décisive toutes les forces de la nation, y compris celles dé la vallée du Rhin.
C'est une cruelle nécessité que l'armée d'Alsace et son chef eurent de la peine à subir et à laquelle ils ne se soumirent qu'à la dernière extrémité.

Plus Citoyens, Soldats

Nancy, 26 août.
Je reçois tous les jours des récriminations contre telle ou telle administration. De braves gens s'étonnent et quelquefois s'indignent de ce qu'on ne les accueille pas toujours avec la même amabilité qu'en temps normal.
Il faut que tout le monde comprenne bien qu'actuellement il n'est pas possible d'examiner les petits faits comme on les examine d'habitude. On n'en a pas le loisir.
Ce sont là les plus minces inconvénients de l'état de guerre. Lorsqu'il arrive à nos concitoyens de stationner trop longtemps à leur gré devant la porte de quelque bureau, qu'ils ne s'impatientent donc pas.
Qu'ils songent aux événements plus graves, qu'ils pensent à nos chers petits pioupious qui couchent sur la dure et ne regrettent pas leur lit, qui marchent joyeusement à la défense de la patrie, et ne se plaignent point.
Cette comparaison sur laquelle il n'est pas besoin d'insister leur sera un excellent exercice d'entraînement, et ils verront tout de suite que les plaintes dont ils nous transmettent l'écho, il vaudrait mieux les garder pour soi, car elles ne sont rien au regard du tragique combat où s'exalte l'âme de la nation.
Une seule chose compte maintenant : la discipline. Non pas seulement la discipline dans les armées, mais la discipline dans les rues, dans les maisons, partout.
Notre sort est en les mains des pouvoirs militaires. Ne raisonnons pas. Obéissons. Le salut commun est à ce prix.
La population lorraine est admirable de sang-froid. Jamais on ne fera comme il convient l'éloge de ce calme dans la tempête. Jamais on n'aura assez d'admiration pour ces braves coeurs qui contiennent l'ardeur de leur patriotisme, pour ces yeux qui cherchent à deviner l'avenir, et qui restent clairs.
Maintenant il n'y a plus de citoyens.
Il ne reste plus en Lorraine et dans toute la France que des soldats.
RENÉ MERCIER.

La Trésorerie générale

Nancy, 26 août.
M. le préfet de Meurthe-et-Moselle est heureux de porter à la connaissance de la population de Nancy que les services de la Trésorerie générale ont reçu l'ordre de rentrer d'extrême urgence à Nancy. Il espère que, mieux que toute autre, cette information officielle sera de nature à rassurer complètement la population qui, désormais, aura pour devoir strict non seulement d'arrêter net tous les bruits tendancieux qui circulent émanant on ne sait de quelle source, mais encore d'imposer énergiquement silence à tous ceux qui, consciemment ou non, aident à les propager.

Salut aux Blessés
Respect aux Prisonniers

Nancy, 26 août.
Trop de curieux font la haie sur les routes par où l'on amène les blessés et les prisonniers. Souvent ces désoeuvrés manifestent leurs sentiments en criant contre les prisonniers. C'est une attitude que l'on ne saurait assez blâmer.
Les soins sont judicieusement donnés aux blessés par les médecins, les infirmiers et les infirmières de la Croix-Rouge. Il est donc inutile et dangereux de les gêner par une pitié encombrante. On a en ce moment autre chose à faire que de se lamenter en public.
Quant aux prisonniers, il est digne de garder le silence devant eux. Ils se sont battus, ils sont vaincus. Respect aux vaincus.
Les Français ont le coeur trop haut pour s'acharner sur un ennemi à terre.
Nous supplions les personnes qui n'ont rien à faire d'aller se promener autre part que sur le passage des blessés et des prisonniers. Cela leur épargnera des émotions pénibles et des gestes malheureux.


AU PAYS DE BRIEY
Une Colonie d'Italiens
EST MASSACRÉE
par les Allemands

Nancy, 26 août.
La «  Gazetta del Popolo » publie sur l'assassinat des Italiens de Jarny (Meurthe-et-Moselle) des détails qu'elle tient du nommé Agostina Bacchetta, de Gattico (Novare), lequel exploitait à Jarny un petit café où se réunissaient les Italiens et dont quelques-uns étaient en pension chez Bacchetta. Celui-ci est revenu en Italie, après un long et pénible voyage, accompagné de la soeur d'un des fusillés.
Voici ce qu'il raconte :
«  Il était environ huit heures du matin, le 3 août, quand plusieurs bataillons du 68e d'infanterie allemande avec de la cavalerie et de l'artillerie pénétrèrent à Jarny sans rencontrer grande résistance de la part des Français, peu nombreux.
«  Les Allemands perdirent un homme tué et quatre blessés. Aussitôt ils accusèrent les habitants d'avoir tiré sur la troupe, et ayant fait appeler le maire et le médecin du pays, les Allemands ordonnèrent de réunir sur la place du village toute la population masculine.
«  Les femmes et les enfants, atterrés, voulaient suivre les hommes, mais ils furent brutalement repoussés à coups de crosse et plusieurs furent atteints de coups de baïonnette.
«  Une femme, nommée Giuseppa Trolli, qui s'opposait à ce que son mari se levât du lit où il était couché gravement malade, cria aux Allemands : «  Bourreaux et sauvages ! » elle fut blessée, ainsi que l'enfant qu'elle tenait dans ses bras.
«  Quand tous les hommes furent réunis, des patrouilles commencèrent à perquisitionner dans les maisons.
«  Dans les chambres de mon café, louées à quelques Italiens, ils trouvèrent des pioches et d'autres outils.
«  Cela suffit pour que l'on arrêtât et que l'on fusillât immédiatement les ouvriers dont voici les noms : Gerolamo Bernacchini, de Gattico ; Giovanni Testa, de Bergame ; Argelo Luisetti, de Castelletto Ticino; Giuseppe Brigatti, de Borgomanero ; Stefano Piralli, de Gattico ; Giovanni Zoni, de Trévise.
«  Dans l'auberge d'un nommé Gaggioli Stefano, de Serralunga, on trouva deux revolvers rouillés ; le propriétaire de l'auberge et un nommé Vaglia Giuseppe, de Castellamonte, et Cesaroni Vincenzo, de Viterbe, furent arrêtés et payèrent de leur vie le résultat de la perquisition.
«  Enfin, dans le café Carrera, on trouva un fusil de chasse appartenant à Pesenti Luigi, de Milan, qui fut aussitôt fusillé.
«  Bacchetta a ajouté que, quelques jours après, on arrêta et fusilla les nommés Tron Giovanni, de Conegliano ; Bisesti Andréa, de Cologna ; un garçon de 13 ans, Enrico Maffi, de Lugo ; Zoni Amilcare, de Trévise, parce que, voulant demander un laissez-passer, pour être rapatriés, Ils avaient interpellé le commandant du régiment allemand. »
Les réfugiés italiens ont dénoncé aux autorités consulaires le drame dont leurs compagnons ont été les victimes ; ils sont allés à Gattico pour apporter à l'hon. Niccolo Leornardi (probablement le maire) la preuve matérielle de leur récit.

CAPTURE D'UNE BATTERIE ALLEMANDE

Nancy, 26 août.
Jeudi soir, sont arrivés à Nancy cinq canons allemands, pris dans le combat de la veille, dans la région d'Erbéviller.
Ils appartiennent au 40e régiment.
Leur passage au faubourg Saint-Georges, rue Saint-Georges et rue des Dominicains, n'a pas manqué d'attirer une foule considérable, qui n'a cessé de pousser des acclamations.
Les cinq canons ont été amenés sur la place Stanislas.
Ils sont au pied de la statue, la gueule tournée vers l'Arc de triomphe, et sous la garde de territoriaux.
Pour faciliter le service d'ordre, en les a entourés d'une barrière de fils de fer.
Dès l'aube les curieux ont commencé à défiler devant ces glorieux trophées.
D'autres canons ont été aussi pris à l'ennemi, dans le même combat, mais leurs affûts étant brisés ils n'ont pu être encore amenés à Nancy.

LE MINISTÈRE DE DÉFENSE NATIONALE

Paris, 27 août, 0 h. 25 m. (visé).
M. Viviani, président du conseil, est allé à l'Elysée annoncer à M, Poincaré que les ministres avaient décidé de démissionner collectivement.
Le président de la République chargea alors M. Viviani de former un nouveau ministère.
A onze heures du soir, M. Viviani fit connaître à M. Poincaré la composition du nouveau cabinet qui est ainsi constitué :
Présidence du conseil, sans portefeuille, M. Viviani.
Justice, M. Briand.
Affaires étrangères, M. Delcassé.
Intérieur, M. Malvy.
Guerre, M. Millerand.
Marine, M. Augagneur.
Finances, M. Ribot.
Instruction publique, M. Albert Sarraut.
Travaux publics, M. Sembat.
Commerce, M. Thomson.
Colonies, M. Doumergue.
Agriculture. M. Fernand David.
Travail, M. Bienvenu-Martin.
Ministre sans portefeuille, M. Jules Guesde.
Sous-secrétaire d'Etat aux Beaux-Arts, M. Dalimier.
M. Viviani est actuellement à l'Elysée où il présente ses nouveaux collaborateurs à M. Poincaré.

Vive la France !

Nancy, 27 août.
Le nouveau ministère scelle l'union nationale d'une façon éclatante.
Voir Jules Guesde et Sembat au gouvernement, et les voir à côté de Ribot, de Thomson, de Millerand, de Briand, c'est une réalité merveilleuse qui dépasse les rêves les plus audacieux.
Les peuples croyaient que nos divisions politiques étaient profondes, que les partis jamais ne pourraient se rejoindre. C'est sur ces divisions que nos ennemis comptaient le plus pour nous vaincre.
Mais sans effort, avec un désintéressement naturel, tous les Français ont oublié leurs querelles, toutes leurs querelles. Ils se sont assemblés autour du drapeau aux trois couleurs. Ils n'ont plus eu, ils n'ont plus qu'une pensée : le salut de la patrie.
Et ce ne sera peut-être pas notre énergie armée qui étonnera le plus le monde, - car le monde connaît le courage français, - mais bien cette réconciliation nationale, sans arrière-pensée, sans ambitions personnelles, en des circonstances où le pouvoir n'est plus qu'une responsabilité terrible dont seules peuvent porter le poids les âmes vigoureuses.
Au-dessus des partis, la Patrie.
Le gouvernement, aujourd'hui, c'est le coeur de la nation. il bat du même rythme pour tous.
Vive la France !
RENÉ MERCIER.

Aux Habitants
DE MEURTHE-ET-MOSELLE
Les devoirs des non combattants

Nancy, 26 août.
Dans toutes les localités où ils ont exercé des violences sur les propriétés ou les personnes, les Allemands ont allégué comme prétexte que des coups de feu avaient été tirés sur leurs troupes par quelques civils.
A la vérité, dans les communes martyres que j'ai visitées, les maires ont protesté avec la dernière énergie contre cette accusation qu'aucun fait ne permet de justifier.
C'est un procès qui s'instruit chaque jour et qui, plus tard, sera jugé.
Mais la France est tellement soucieuse de ne voir aucun de ses enfants s'écarter du Droit que je rappelle, en son nom, à toute la population de Meurthe-et-Moselle ceci :
Le fait, pour un civil, de tirer sur l'ennemi, loin d'être un acte de courage, constituerait un double crime :
1° Crime contre le droit des gens - car, seuls, ont droit de prendre part au combat les hommes régulièrement incorporés dans les armées en présence ;
2e Crime contre la cité - car de tels actes ne pourraient avoir d'autre conséquence que d'exposer la commune où ils seraient commis aux plus graves dangers, La France, pour se défendre, ne réclame d'autre concours armé que celui de ses soldats. Elle n'en accepte pas d'autres.
Tout civil peut et doit servir son pays de tout coeur, non par l'usage illégal des armes, mais en restant simplement à son poste et en s'y appliquant de son mieux à sa tâche propre.
Et s'il se trouvait dans le département de Meurthe-et-Moselle un seul homme assez peu maître de ses nerfs ou assez perfide, assez fou ou assez coupable pour tirer, lui civil, sur un soldat ennemi, je déclare que cet homme devrait être considéré par les patriotes et traité par eux comme un mauvais citoyen, sinon même comme un agent provocateur.
L. MIRMAN.

NOTE. - Je me proposais depuis quelques jours de publier cet appel. Des opérations militaires importantes qui se sont engagées dans les environs de Nancy m'en ont empêché ; quelques alarmistes, qui interprètent tout dans le sens de leur panique, auraient pu croire en effet que ces recommandations étaient inspirées par la crainte spéciale des périls menaçant la grande cité lorraine. Aujourd'hui que les caisses publiques sont rentrées à Nancy (ce qui constitue, on en conviendra, le plus rassurant des symptômes), nul ne sera plus exposé, j'imagine, à commettre une telle erreur, et la déclaration ci-dessus gardera aux yeux de tous le caractère général que j'entends lui donner.

A LA PRÉFECTURE

M. Burnouf, nommé conseiller de préfecture de Meurthe-et-Moselle, est arrivé hier mercredi à Nancy, venant de Cherbourg, et a pris immédiatement possession de son poste. M. le Préfet a félicité M. Burnouf de la hâte patriotique qu'il avait mise à se rendre d'extrême urgence à Nancy, malgré les difficultés des voyage.

Entre Nancy et les Vosges
DES COMBATS ACHARNÉS TOURNENT A NOTRE AVANTAGE

Paris, 27 août, minuit 45.
(Communiqué du ministère de la guerre)
D'une façon générale, l'offensive française progresse entre Nancy et les Vosges.
Toutefois, la droite a dû se replier légèrement dans la région de Saint-Dié.
L'ennemi a subi des pertes considérables.
Quinze cents cadavres ont été retrouvés dans un espace très restreint.
Dans les tranchées, une section allemande tout entière a été fauchée par nos obus.
Les morts étaient cloués sur place, encore dans la position de mise en joue.
Les combats acharnés, livrés depuis trois jours dans la région, paraissent tourner à notre avantage.

Dans la Woëvre
Aucun fait saillant dans la Woëvre, où les forces opposées semblent se recueillir après les récents combats

(Communiqué du ministère de la Guerre du 27 août., à 23 heures.)
Dans les Vosges
SAINT-DIÉ BOMBARDÉ
Dans les Vosges, les Français ont repris l'offensive et refoulé les forces allemandes qui, hier, les avaient fait reculer du côté de Saint-Dié.
Les Allemands ont bombardé Saint-Dié, ville ouverte.

Des Vosges à Nancy
LES PERTES ALLEMANDES
Dans la région des Vosges à Nancy, l'offensive française a été ininterrompue depuis cinq jours.
Les pertes allemandes sont considérables.
On trouva au sud-est de Nancy, sur un front de trois kilomètres, 2.500 morts allemands, et dans la région de Vitrimont, sur un front de quatre kilomètres, 4.500 morts.

LONGWY CAPITULE
Longwy, très vieille forteresse, dont la garnison comportait un bataillon, bombardée depuis le 3 août, a capitulé aujourd'hui, après vingt-quatre jours de résistance.
La moitié de l'effectif est tué ou blessé.
Le lieutenant-colonel Darche, gouverneur, est nommé officier de la Légion d'honneur pour conduite héroïque.

Sur la Meuse
Sur la Meuse, les Français ont repoussé avec une extrême vigueur plusieurs attaques allemandes.

LA SITUATION
au 28 Août

(Communiqué du ministère de la Guerre du 28 août, 23 heures).
La situation de front de la Somme aux Vosges reste aujourd'hui ce qu'elle était hier.
Les Allemands paraissent avoir ralenti leur marche des deux côtés, où ils combattent depuis quinze jours.
Les pertes allemandes sont considérables. Deux régiments, le 112e et le 124e, ont été réunis en un seul. Les compagnies sont réduites à un effectif très faible.

2 nouveaux Canons allemands
SUR LA PLACE STANISLAS

Nancy, 28 août.
Vendredi soir, vers 5 heures, venant de la direction d'Essey, deux nouveaux canons allemands de campagne sont venus rejoindre, sur la place Stanislas, les cinq amenés la veille.
Il y en a donc actuellement sept, au pied de la statue de Stanislas, et il y en aurait bien davantage si l'on avait pu amener aussi ceux, beaucoup plus nombreux, dont les affûts ont été brisés dans la bataille.
Un nombreux public ne cesse de défiler devant ces glorieux trophées.

INTERDICTION DES
Appareils distributeurs d'argent de jetons de consommations, etc.

ARRÊTÉ PRÉFECTORAL
Le Préfet de Meurthe-et-Moselle, Vu le décret du 2 août 1914, comportant déclaration de l'état de siège, Vu la loi du 5 août 1914 maintenant l'état de siège, Arrête :
Article premier. - Il est interdit à tout débit de vins, restaurateur, cafetier et généralement à tout commerçant d'exploiter tous appareils distributeurs d'argent, de jetons de consommations, et d'une manière générale tous appareils dont le fonctionnement repose sur l'adresse ou le hasard et qui sont destinés à procurer un gain ou une consommation moyennant enjeu. Ces appareils devront être enlevés dans les trois jours.
Article 3. - MM. les sous-préfets, maires, adjoints et tous agents de la force publique sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté.
Nancy, le 28 août 1914.
Le préfet :
Signé : MIRMAN.

A BELFORT

Paris, 29 août, 17 h. 25
De Bellegarde, on télégraphie au «  Temps » que deux aéroplanes survolant Belfort ont vainement tenté de faire sauter le hangar des dirigeables.
Les bombes lancées n'ont causé aucun dégât.

A l'ordre du jour

Nancy, 30 août
Le lieutenant Lavocat avait été cité dernièrement à l'ordre du jour «  pour avoir fait preuve de coup d'oeil et d'une hardiesse exceptionnelle dans toutes les actions dont il a été chargé depuis le début de la guerre et pour avoir entraîné avec le plus brillant courage sa section à l'assaut, assaut au cours duquel il a été tué au premier rang ».

A L'ORDRE DU JOUR

Paris, 30 août (officiel).
Le général commandant l'armée a cité à l'ordre de l'armée :
Le sous-lieutenant Viala, du 4e bataillon de chasseurs, qui est tombé mortellement frappé, le 20 août, au moment où, à la tête de sa section, il prononçait une contre-attaque à la baïonnette.
Le sous-lieutenant de Castelnau, du 4e bataillon de chasseurs, qui a fait preuve du plus grand courage au cours du combat du 20 août, ayant pris le commandement de sa compagnie, a tenu tête à l'ennemi pendant 5 heures et a été tué au moment où il venait de le rejeter en arrière par une vigoureuse contre-attaque.
Les sous-lieutenants Devic, Picard, Munnier et Guillemin, du même bataillon, qui ont été tués au cours du combat du 20 août, à la tête de leur troupe.
Les citations à l'ordre de l'armée de ces officiers sont les suprêmes récompenses qui puissent être accordées à eux et à leurs familles.

LA SITUATION
En Lorraine

Paris, 30 août (officiel).
La progression de nos forces s'est accentuée. Nous sommes maîtres de la ligne de la Mortagne, et notre droite avance.

Sur la Meuse

Paris, 30 août (officiel).
Rien à signaler sur le front de la Meuse.
Une violente action a eu lieu hier dans la région de Lannoy, Signy-l'Abbaye, Novion-Porcien, sans résultat décisif. L'attaque reprendra demain.
A notre aile gauche, une véritable bataille a été menée par quatre de nos corps d'armée. La droite de ces quatre corps prenant l'offensive a repoussé sur Guise et à l'est une attaque conduite par le 10e corps allemand et la garde qui ont subi des pertes considérables.
La gauche a été moins heureuse ; des forces allemandes, progressent dans la direction de La Fère.

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