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Camp de Blâmont - 1670
 


Revue militaire rédigée à l'État-major de l'armée - Avril 1899

L'ORIGINE DES GRANDES MANOEUVRES - Camps sous Louis XIV

[...]
Le camp fut levé le 27 août et toute l'armée, sous les ordres du maréchal de Crêqui, se dirigea vers la Lorraine par Soissons, Reims, Sainte-Menehould- Ce mouvement avait été l'objet de prescriptions minutieuses pour assurer le bon ordre, la subsistance des troupes et ménager les populations des provinces traversées.
Louvois voulut présider lui-même au début de la marche et accompagna les troupes jusqu'à Reims. Revenu à Saint-Germain, il recommandait encore au maréchal de Créqui de veiller rigoureusement à l'exécution des ordres du roi. Cette vigilance était d'autant plus nécessaire que l'occupation de la Lorraine avait pour objet, dans la pensée de Louis XIV, non seulement de châtier le duc Charles IV, mais de préparer une absorption définitive de cette province par la France (1).
Afin d'affirmer ainsi la domination royale, des effectifs très considérables furent maintenus pendant tout l'hiver en Lorraine et en Barrois (2). Au mois d'avril, l'infanterie quitta ses quartiers et fut embarquée sur la Meuse, à destination de la Flandre, où Louis XIV comptait faire un important rassemblement de troupes, en prévision d'un conflit prochain avec la Hollande (3).
Quant à la cavalerie, elle fut maintenue en Lorraine. Mais, pour que son entretien pesât moins lourdement sur la population, il fut décidé que les chevaux seraient mis à l'herbe une partie de l'été : on voit inaugurer ainsi un mode de subsistance dont l'emploi sera très fréquent par la suite; ce système consiste à former, dans certaines vallées plantureuses, des camps spéciaux à la cavalerie, dans lesquels cette arme est maintenue tant qu'elle trouve à subsister dans un rayon déterminé.
L'établissement des camps de Lorraine, en 1671, donna lieu, entre Louvois, le maréchal de Créqui et l'intendant de Charuel, à une très longue correspondance consacrée surtout aux questions administratives. Cependant, si l'idée première du système est d'ordre économique, les exigences de l'instruction des troupes ne sont point perdues de vue.
C'est ainsi que, le 20 janvier 1671, le maréchal de Créqui adresse à Louvois un projet pour F établissement de trois camps. Il accompagne cet envoi d'une lettre au roi :
«  Afin de contenir sur l'extrémité des frontières les troupes en bon ordre, il conviendrait, ce semble, de les faire retrancher et palissader dans le camp afin de les occuper, de les disposer en deux lignes et de faire le service avec la régularité que Votre Majesté m'a montrée.
«  Quoique les camps soient établis près de quelques petites villes, pour la commodité de la munition, Votre Majesté ne souhaite-t-elle pas que tous les officiers généraux et autres soient campés afin que les choses soient plus dans la règle ?
«  Concernant la police du camp, l'on fera afficher les règlements de Votre Majesté, l'on aura soin de pourvoir de vivres les lieux qui seront destinés pour le campement, et ainsi l'on n'aura plus qu'à songer à exercer les troupes et qu'à les mettre souvent en bataille.
«  Et afin que je puisse plus commodément veiller sur: les trois corps de troupes qui seront séparés, Votre Majesté agréera, s'il lui plaît, d'y attacher trois officiers généraux, afin que je puisse plus aisément me porter aux endroits où le service de Votre Majesté m'appellera... (4). »
Le 27 janvier, Louvois répondit au maréchal :
«  Le 10 du mois de juin, vous ferez rassembler 1500 chevaux, dans le lieu le plus commode, au milieu des quartiers où ils seront logés, et vous les tiendrez 20 jours ensemble, les exerçant à tirer, à marcher et à tout ce que vous croyez de plus à désirer pour le service du roi. Après que vous aurez tenu pendant 20 jours le, premier corps ensemble, vous irez au milieu des quartiers de 1500 autres chevaux pour les tenir autant, et ainsi jusqu'à ce que vous ayez fait 4 campements,-qui vous aient donné lieu d'exercer, pendant ce temps de 20 jours, toute la cavalerie logée dans l'étendue de la Lorraine..... Le roi veut que les officiers soient campés
effectivement avec leurs troupes »
Les projets primitifs subirent des modifications à la suite de la reconnaissance des ressources offertes par les différentes localités pour la subsistance de la cavalerie. Finalement, toutes les troupes furent, à partir du 10 juin, réparties en deux camps, Blâmont et Saint-Pierre, d'où on les dirigea sur la vallée de la Sarre, où elles furent successivement installées près de Berthelmin, Saarwerden, Sarralbe, Sarreguemines, etc.
Le 14 juin 1671, le maréchal de Créqui écrivait au roi, du camp de Blamont :
«  Peu de temps après m'être rendu au camp de Blamont, avec 31 escadrons de cavalerie ou de gendarmerie et 2 compagnies de dragons, j'ai vu exactement, Sire, toutes les troupes que j'ai trouvées si lestes que j'ose dire à Voire Majesté qu'elle ne les a jamais vues plus belles, ni plus en état d'entreprendre tout ce qu'il plaira à Votre Majesté d'ordonner. Hier, sur la hauteur du camp, nous fîmes toutes sortes de mouvements avec beaucoup de justesse. Il est vrai qu'il restait dans le camp un nombre considérable de bidets, et qu'il n'y a point de compagnie qui ne soit pourvue des tentes qu'il leur faut... (5). »
Cette série de campements se termina à Bouzonville, où les troupes furent toutes réunies à la fin de septembre. Leur dislocation eut lieu le 20 octobre et jours suivants ; on les dirigea, par petits détachements, sur leurs quartiers d'hiver de la Lorraine et des Évêchés.

(1) Une lettre adressée, le 6 septembre, par Louvois au maréchal de Créqui, porte l'annotation suivante de la main de Louis XIV : «  Ni la soumission du duc de Lorraine, ni sa résistance ne me feront pas changer de résolution et, puisque sa méchante conduite m'a obligé à vous y envoyer, je n'entendrai à aucune négociation que tous ses États ne soient réduits sous mon obéissance. »
(2) Voir Tiroirs de Louis XIV, p. 208, l'état des troupes françaises en Lorraine, le 16 octobre 1670. Elles comprenaient 11 régiments d'infanterie (174 compagnies), 13 compagnies de la Maison du Roi et de la gendarmerie, 25 escadrons de cavalerie légère, 4 escadrons de dragons. Mention est faite que des ordres seront donnés pour faire passer en Lorraine six autres escadrons de cavalerie légère.
(3) Voir une lettre de Louvois à M. de Montai, gouverneur de Charleroy (plus tard lieutenant général) : «  Le Roi ayant résolu de faire partir de Lorraine, au commencement d'avril prochain, toute l'infanterie qui est présentement en quartier d'hiver, pour la faire marcher toute ensemble jusqu'à Dunkerque, il la fera embarquer sur la Meuse et la fera conduire par eau jusqu'à l'endroit où la Meuse passe le plus proche de Philippeville. (8 décembre 1670.) » Arch. histor. anciennes, vol. 252. M. de Montai était chargé de reconnaître les points de débarquement et les itinéraires pour se rendre à Philippeville, Charleroy et Tournay, en faisant des étapes moyennes de 4 lieues. Le mouvement s'exécuta à l'époque indiquée. Le 7 avril 1671, toute l'infanterie (11,7000 à 11,800 hommes) s'embarqua, devant Louvois, sur 110 bateaux.-
(4) Arch. histor. anciennes, vol. 468
(5) Le 24 mai, le maréchal écrivait de Nancy : «  Je puis dire à Votre Majesté, devant que de voir toutes les troupes ensemble, que rien ne sera de plus beau que le corps de cavalerie qui est ici ; chaque escadron s'est mis en état de camper, aura des tentes bonnes et d'un bon service. L'équipage de l'officier n'est pas du tout si complet ; je vois que les brigadiers n'ont guère de tentes, que les principaux officiers de gendarmerie en sont peu pourvus aussi, de sorte qu'il faudra les obliger à cette dépense, Votre Majesté ayant ordonné qu'ils camperont régulièrement à leur compagnie. » (Arch. hist. anciennes, vol. 417.) - Dans son projet du 20 janvier, le maréchal de Créqui proposait : «  On ordonnera aux peuples de porter du bois pour hutter les escadrons qui doivent être dans leur voisinage et, le camp se levant, chaque communauté viendra reprendre ses matériaux s'ils en valent la peine. » On voit qu'il avait été possible de distribuer des tentes, qui offraient plus de commodité que les huttes, pour des camps appelés à se déplacer. C'est, parait-il, la première fois que ce matériel a été mis en service pour un effectif aussi important ; on le voit, à partir de cette époque, entrer progressivement dans l'usage de l'armée. En 1682, cet emploi n'avait pas encore un caractère général, si l'on s'en réfère aux Arts de l'homme d'épée (ou Dictionnaire du Gentilhomme, par Guillet, Paris, 1682, in-8°). On lit, en effet, à l'article Baraque de ce recueil : «  Ce mot disparaîtra bientôt si le Roi donne des tentes à toutes les troupes comme quelques-unes en ont déjà. »

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