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L'Express du Midi - Presse 1914-1918

NDLR : nous n'avons pas repris ici les nombreux extraits de communiqués officiels, déjà cités dans les articles d'autres journaux.


Mardi 1er septembre 1914
RECIT DE REFUGIES
Rennes, 31 août.
Parmi les émigrants arrivés ici se trouve une famille de Cirey (Meurthe-et-Moselle), qui nous fait le récit suivant :
«  Quarante années de travail et d'économies nous ont permis de faire construire à l'entrée du village une des plus belles maisons ; cette maison, nous l'avons voulue confortable. Les officiers allemands la choisirent : nous dûmes d'abord leur porter une douzaine de seaux d'eau pour leur tub ; ils s'amusèrent brutalement à crever à coups de sabre quelques portraits de famille accrochés dans les chambres ; l'un d'eux trouva plaisant de se promener nu dans le jardin, coiffé de la couronne d'oranger qui date de mon mariage.
» Ils commandèrent ensuite pour le dîner du poulet, des pommes de terre, du fromage et du vin ; je préparai le repas comme pour nous. Tandis que je surveillais la cuisine, un d'eux se détacha et me fit goûter sous ses yeux aux plats et à la boisson.
- Nous ne voulons pas être empoisonnés, dit-il.
» Il parlait français : je lui fis honte de ces profanations inutiles. C'était un tout jeune nomme blond, la figure fraîche, 22 ans à peine ; il me confia :
- Moi, je ne suis pas soldat de profession, je suis avocat à Munich : j'ai laissé ma fiancée là-bas : je lui ai promis pour notre mariage un collier à trois rangées de perles ».
» Et comme il sentait qu'il allait s'émouvoir, il ricana :
- je suis venu en mai à Paris : j'ai choisi rue de la Paix ; le collier ne me coûtera pas cher ».
» Dans la nuit, la patrouille est repartie. Les Français sont venus ; nous avons dépouillé nos jardins et nos caves pour les recevoir.
Deux jours plus tard, le canon tonnait du côté de Blamont et de Badonviller. Pendant deux semaines tour à tour les troupes françaises et allemandes se sont pourchassées ; nous avons revu les uhlans ; ils ont brûlé d'abord la mairie, puis l'hôpital ; le village n'est que ruines.
» Je veux vous dire quelle fut ma dernière rencontre avec l'avocat de Munich :
» Jeudi, vers 8 heures, des pas de cheval nous réveillent brusquement ; rude galop où nous reconnaissons les uhlans. On frappe à la maison ; j'allume la lampe ; celui qui m'apparaît, c'est le jeune officier du premier jour ; il interroge sèchement :
- Des Français aujourd'hui ? S'il en est passé, certes, quelques-uns ont dîné ici ; la table non desservie l'atteste assez. »
» Je réponds : Non !
- Nous sommes avertis qu'ils sont venus ; de quel côté sont-ils partis ? »
» Je nie toujours ; mon mari, à qui les émotions des derniers jours ont donné une poussée de rhumatismes, est arraché de son lit.
- Où sont les Français, vieux diable ?
- Il ne saurait rien répondre, depuis vingt-quatre heures il n'a pas quitté sa chambre.
- Prenez garde, dit l'officier » : et il s'en va.
» Le village est levé ; on nous ordonne d'éteindre les lumières ; des mitrailleuses sont placées aux deux entrées de la grande route ; des sentinelles sont postées.
» Nous savons les Français cachés dans un bois ; il y aura bataille cette nuit.
» Notre maison est grande et très confortable ; les voûtes de la cave sont en ciment armé. On peut s'y cacher à l'abri des balles et même des obus allemands. Quelques femmes des rares familles qui n'ont pas voulu, malgré tant de périls, abandonner le foyer natal demandent à s'y réfugier. On le leur permet. Défense est faite à toutes, sous quelque prétexte que ce soit, d'en sortir de toute la nuit. Nous voilà comme au fond d'un puits, tapies contre les tonneaux, assises sur des planchettes, prêtant l'oreille au moindre bruit.
» Parmi nous s'est glissée la fille d un douanier, une innocente gardienne de chèvres qui malgré ses vingt ans, n'en parait pas plus de douze : elle est bien connue à Cirey ; on l'appelait Rosette la Folle.
» Rosette se rappelle qu'en partant elle a oublié les clefs sur sa porte. Qu'a-t-elle à risquer ? Un mauvais lit de paille, quelques hardes données par charité. Avec une obstination qui pour tout autre serait de la folie, la démente veut, retourner chez elle pour reprendre ses clefs : on la retient ; elle pleure, lutte, s'échappe.
» Ah ! le retour n'a pas été long. La lourde porte que nous avions barricadée est enfoncée à coups de crosse : cinq uhlans portent, ficelé, un pauvre petit être qui se débat : c'est Rosette. On la bâillonne avec le mouchoir qui la coiffait ; un instant plus tard elle était fusillée.
» Les Français ont pu chasser une fois encore les bandits allemands. Au petit jour en nous délivrant, le lieutenant de dragons qui commandait nous a dit : «  Partez, partez vite, ils peuvent revenir ».
» Nous avons fait 36 kilomètres à pied dans la campagne ; voyez mon pauvre mari, ses mains et ses genoux sont des paquets de noeuds ».


27 janvier 1915
NOS CHASSEURS FONT SAUTER LA GARE D'EMBERMENIL
Est de la France, 26 janvier.
Des chasseurs ont tait sauter la gare d'Embermenil, la station avant Avricourt.
Les Allemands se promettaient, parait-il, une nouvelle visite en train blindé : les détonations ont réveillé la paisible population de Lunéville qui dort, dans la nuit la plus noire ; aucune lumière n'est tolérée et le silence le pus complet.
Il était 2 heures du matin.


Mardi 2 février 1915
En Lorraine
L'Embuscade d'Emberménil
L'Ennemi prépare une attaque de nuit. - Les tranchées vides. - Dans le village. - Est pris qui croyait prendre

D'un de nos correspondants de guerre.
Lunéville, janvier 1915.
Solidement appuyées sur les forêts reconquises de Parroy et de Mondon, nos troupes tenaient les débouchés de la vallée de la Vezouse. Incapable de forcer notre front de Lorraine, l'ennemi bornait son activité à exécuter des raids de cavalerie, dont toute la mission stratégique consistait à piller les quelques villages frontières restés en dehors de nos lignes.
Les derniers jours de décembre, nos chasseurs avaient surpris ainsi une compagnie allemande en train de rançonner le-hameau de Val-et-Châtillon, au sud de Cirey. L'adversaire, cerné par nos braves vitriers, avait été gratifié d'une dure leçon.
Le 24 janvier, un fait analogue allait se produire dans la même région. Notre commandement était prévenu en pleine nuit, par une patrouille de nos douaniers, qu'une colonne d'infanterie ennemie avançait le long de la voie ferrée d'Avricourt. Les indications étaient précises. Il eût suffi de donner l'ordre à nos grand-gardes d'Emberménil et de Leintrey de faire jouer les projecteurs pour qu'aussitôt le feu de notre artillerie coupât net la marche de l'adversaire.
Notre état-major estimait plus profitable de laisser la colonne s'avancer dans nos lignes. Ainsi, nous avions l'espoir de l'anéantir entière ou de la capturer. Entre Emberménil et Leintrey, notre génie avait disposé une série d'ouvrages précédés d'un assortiment complet de fils barbelés. En évacuant volontairement ces tranchées, nous ne risquions guère que l'ennemi s'y installât, car tout le système défensif se trouvait disposé du côté opposé au front allemand. Escomptant que l'adversaire, enhardi par toute absence de résistance sur ce point, se laisserait entraîner jusqu'à l'entrée des villages, notre commandement donnait en pleine nuit l'ordre à nos grand-gardes de se replier progressivement.
Notre recul volontaire s'opérait vers deux heures du matin. Sans tirer un seul coup de fusil, nos lignes se transportent trois kilomètres vers l'ouest. Seules deux de nos sections formées pair nos meilleurs éclaireurs restent en contact avec l'adversaire.
La colonne allemande arrive sans encombre à nos premiers fils de fer. Nous la devinons dans l'ombre en train de faire cisailler par ses pionniers un passage, à travers les ronces artificielles. Le travail demande unebonne heure, au bout de laquelle les ennemis se précipitent vers nos fossés, croyant nous y surprendre. Mais les tranchées, sont vides. Tout fiers de leurs nouvelles positions, les
ennemis s'y installent. Ils attendent le jour.
L'aube se lève dans une tempête de neige. Les casques à pointe, dés que la campagne sort de l'ombre, ne tardent pas à regretter leur encombrante conquête. Les ouvrages, aménagés par nous, sont d'un accès redoutable vers l'est, vers la ligne prussienne. Mais à l'ouest, un bois les domine et le terrain permet sans danger à une troupe française d'exécuter un tir plongeant tout le long des fossés. L'ennemi est à la merci d'une contre-attaque des nôtres. Il lui faut ou prendre le chemin du retour ou chercher un autre point d'appui.
Emberménil est à quatre cents mètres de là, au croisement de deux routes. Ses maisons intactes ont un aspect engageant. Pas une culotte rouge aux environs, car nos troupes sont dissimulées, aux aguets, le long de la lisière orientale de la forêt de Parroy. Des taillis qui nous abritent, nous voyons distinctement une patrouille allemande se diriger vers les premières fermes du village. Les ennemis y pénètrent, les fouillent. Deux uhlans à bicyclettes suivent la route et viennent s'arrêter à moins de 500 mètres des bois. Leurs investigations sont rassurantes sans doute, car bientôt le gros de la troupe se dirige à son tour vers Emberménil. Le hameau a été évacué par la plupart de ses habitants, mais des volailles et quelques porcs, oubliés dans la fuite, vaguent dans les champs d'alentour.
Quelques bouteilles de vin ont dû rester au fond des caves, car les Allemands ne tardent pas à rompre les rangs, en quête de ripaille. Le moment de l'attaque est venu. Il est neuf heures. Des taillis que nous occupons, sur la droite, part une fusillade nourrie. En même temps, un train français, forteresse improvisée, arrive à toute vapeur, menaçant la gauche adverse, tandis qu'un peloton de dragons galope sur la route de Morainviller
Les Allemands sont pris dans Emberménil comme dans un piège. Ils tentent de prendre leur formation de combat, mais déjà une batterie de 75 dirige ses obus sur les fermes, trouant les murs, faisant écrouler les toits, ensevelissant sous les décombres les ennemis qui cherchaient un abri dans le village.
Une centaine d'adversaires pourtant ont eu le temps de battre en retraite le long de la voie ferrée. Le reste des forces allemandes s'est arrêté autour de la gare d'Emberménil et tente une résistance derrière les baraquements. Mais déjà notre peloton de dragons, mettant pied à terre, se prépare, lance au poing, à donner l'assaut sur la gauche. Une mitrailleuse française, en position sur la locomotive, s'est avancée à trois cents mètres de la gare et ouvre un feu fauchant. Il n'en faut pas plus. Un drapeau blanc est hissé, tandis que des mains se lèvent. L'ennemi se rend.
Nous capturons ainsi une centaine de soldats bavarois faisant partie du 1er corps de réserve. Parmi les prisonniers, il! y avait trois jeunes gens de moins de 16 ans. Nos pertes s'élevaient à une douzaine de blessés. - R. T.
[...]


LES PRISONNIERS EN ALLEMAGNE AU CAMP DE HOLZMINDEN
Paris, 2 février.
M. A. Lahoussaye, vétérinaire inspecteur sanitaire à Blamont, qui revient de Holzminden, a raconté ainsi le séjour qu'il a fait dans le camp :
«  Erigé eu plein champ, dans un vrai cloaque de boue liquide, cette cité de malheur est composée de baraques en planches plus ou moins jointes, à l'achèvement desquelles quarante soldats français et environ trois cent cinquante soldats belges travaillaient quand j'y arrivai avec mes compagnons ; cinquante personnes auraient de la peine à s'y loger à l'aise ; aussi la chiourme militaire prussienne y place cent vingt individus ; je précise les conditions d'aménagement parce que j'ai appris qu'un délégué plus ou moins officiel de je ne sais quelle administration a affirmé l'existence à Holzminden d'un confortable
confortable hygiénique avec chauffage central, douches chaudes, électricité, etc,
«  Il y a à Holzminden, des détenus de tous les âges : femmes, enfants, adultes et vieillards appartenant à tous les rangs sociaux ; la plupart ont vu tout ce qu'il est possible de voir en fait de carnage et d'horreurs ; J'ai causé avec des habitants du Pas-de-Calais, de la Somme, de la Meuse et de tous nos départements envahis, à des gens de ma clientèle, à des Alsaciens-Lorrains arrêtés et brutalisés comme suspects ; beaucoup sont dans un dénuement lamentable, ayant été arrêtés dans leur champ sans avoir pu repasser devant leurs demeures pour y prendre le moindre objet indispensable.
«  Le camp est entouré d'un enchevêtrement de fils barbelés de 3 mètres de hauteur, surveillé par des sentinelles apostées dans des blockhauss : ce camp, lorsqu'il sera complètement achevé, pourra contenir 10.000 otages et internés civils ; il y en avait 4.000 fin décembre ; à ce moment, il était permis à chaque détenu d'écrire et de recevoir, chaque semaine, une lettre de 32 lignes ; c'est un adjudicataire qui devait nourrir la colonie, moyennant 55 pfennigs par tête et par jour. Comme il n'en dépensait que 20 à peine, il réalisera d'honnêtes bénéfices avant le licenciement des malheureux qu'il affame si la situation se prolonge.
«  Il est vrai d'ajouter qu'à ceux dont les ressources sont suffisantes, ce mercanti allemand vend à prix d'or saucisses, charcuterie et autres «  delikatessen ».


2 juillet 1915
Surveillez les espion.
Après enquêtes par la police mobile de Toulouse, une série d'arrestations ont été opérées, dans notre département du Gers, sous l'inculpation d'espionnage.
On cite notamment les réfugiées lorraines au SaintPuy, Lucie Frocat et les deux soeurs
Albertine et Joséphine Bloedt.
A Marciac, la nommée Louise Clodon, a été écrouée à la prison militaire de Toulouse.
Agée de 23 ans, Louise Clodon, de Repaix (Meurthe-et- Moselle), est inculpée d'avoir entretenu des intelligences avec l'ennemi, alors qu'elle était encore dans son pays d'origine.
A Mirande, la gendarmerie a arrêté samedi une femme du même département, accusée elle aussi d'espionnage.
Aux municipalités de veiller et de signaler à la police toutes les personnes suspectes à un titre quelconque, d'avoir ou d'avoir eu des rapports avec les Allemands.


Lundi 16 août 1915
MORT DE L'AVIATEUR DE LOSQUES
Paris, 15 août.
On vient d'apprendre la mort de l'aviateur Daniel de Losques, tué au cours d'un de ses raids, qui lui avaient valu la citation à l'ordre du jour et la Croix de guerre.
C'est un avion allemand qui en a donné la nouvelle, en lançant dans le voisinage du terrain d'atterrissage une oriflamme à laquelle était fixé un papier contenant ces renseignements :
«  De Losques et son pilote se sont bravement battus ; on les a enterrés à Harbouey près de Blamont ; leurs papiers seront renvoyés par la Suisse. »
Daniel de Losques était, avant la guerre, un de nos meilleurs dessinateurs humoristiques.


Mercredi 20 novembre 1918
La Capitulation de l'Allemagne
ODIEUX JUSQU'A LA FIN !
Paris. 19 novembre.
Les Allemands ont à leur ordinaire été odieux jusqu'au dernier moment. Il y avait à Blamont une vieille femme qui se mourait ; elle demanda un prêtre ; les Allemands lui amenèrent le curé de Château-Salins la nuit, à cheval, et les yeux bandés. L'officier qui l'accompagnait exigea un texte pour suivre la messe des morts, afin de s'assurer que le prêtre ne changeait rien au texte, sans doute, et n'introduisait pas de renseignements militaires dans le Dies Irae, ni des paroles séditieuses dans le De Profundis. Cela n'est que ridicule ! Ce qui est plus grave, c'est qu'en se retirant, ils laissent des patrouilles, lesquelles fouillent le pays, brûlent les villages qu'elles trouvent pavoisés.
 

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