|
Aujourd’hui, l’article 55 du code civil
mentionne « Les déclarations de naissance sont faites dans
les cinq jours de l'accouchement, à l'officier de l'état civil
du lieu. »
Mais le code civil du 21 mars 1803 prévoyait :
« Art. 55. Les déclarations de naissance seront faites, dans
les trois jours de l’accouchement, à l’officier de l’état civil
du lieu : l’enfant lui sera présenté. »
« Art. 56. La naissance de l'enfant sera déclarée par le père,
ou, à défaut du père, par les docteurs en médecine ou en
chirurgie, sages-femmes, officiers de santé ou autres personnes
qui auront assisté à l'accouchement; et lorsque la mère sera
accouchée hors de son domicile, par la personne chez qui elle
sera accouchée.
L'acte de naissance sera rédigé de suite, en présence de deux
témoins. »
C’est donc le déclarant (très souvent le père) qui se rend en
mairie avec le nouveau-né pour le présenter à l’officier
d’état-civil, accompagné obligatoirement de deux témoins : on
retrouve la formulation de cette présentation dans la rédaction
de chaque acte d’état-civil de naissance du XIXème
siècle.
Cette présentation du nouveau-né à l’officier d’état-civil a
pour rôle de prévenir les abus, comme celui d'inscrire comme né
récemment un enfant né depuis plus longtemps, ne serait-ce que
pour échapper, en cas de retard, à l’article 346 du code pénal
de 1810 qui prévoit que « Toute personne qui, ayant assisté à
un accouchement, n'aura pas fait la déclaration à elle prescrite
par l'article 56 du Code Napoléon, et dans le délai fixé par
l'article 55 du même Code, sera punie d'un emprisonnement de six
jours à six mois, et d'une amende de seize francs à trois cents
francs. » (il faut noter que la Cour de Cassation a très
vite considéré que la mère du nouveau-né qui ne déclare pas la
naissance, n’est pas passible de la peine prononcée par
l'article 346 du Code pénal, considérant que l'accouchement est
un fait personnel auquel ne peut s'appliquer la simple
qualification d'assistance).
En outre, si avec cette présentation obligatoire l’officier
d’état-civil peut s’assurer aussi que l’enfant est bien vivant,
il est aussi tenu de contrôler le sexe de l’enfant, même si
cette obligation formelle de la loi du 20 septembre 1792 n’a pas
été reprise dans la rédaction de l’article 55.
Cependant, vers la seconde moitié du XIXème siècle,
les médecins s’élèvent contre la mise en danger des nouveau-nés
fragilisés par ce déplacement en mairie. Si l’on retrouve le vœu
officiel d’une modification de l’article 55 du code civil
(Conseil général de la Seine depuis 1845, Académie de Médecine
1850...), certaines villes ont dès 1847 organisé la constatation
des naissances à domicile (Lille, Douai, Lyon, Versailles...).
Dans « Le salut des nouveau-nés, conseil aux familles »
édité à Paris en 1868, le Docteur Charles Ley, écrit en
conclusion :
« En présence des dangers que fait courir à l'enfant
nouveau-né une sortie prématurée, dangers signalés par les
auteurs les plus autorisés, Toaldo, Villermé, W. Edwards,
Duméril, H. Roger, Blache, Bouchut, etc., etc.
Vu l'article 55 du Code civil, qui ne prescrit pas le transport
de l'enfant à la mairie, et l'avis du conseil d'État
interprétant la loi dans ce sens ; d'après l'opinion des
jurisconsultes les plus compétents, Sauzet, Valette, Dalloz,
Paillet, concluant au libre choix du lieu de présentation de
l'enfant ; considérant que les vœux du conseil général de la
Seine et de l'administration supérieure elle-même, sont pour la
cessation d'une coutume nuisible; considérant enfin que beaucoup
de maires exécutent la loi dans son intégrité, sans faire porter
les enfants à l'état civil, que tous les citoyens, du reste, ont
le droit de faire respecter la Loi, nous pensons qu'il y a lieu
de laisser à l'administration le soin de choisir son moyen de
contrôle pour la CONSTATATION DES NAISSANCES, et qu'il
appartient légalement à tout le monde de résister à une coutume
barbare, tout en se conformant aux prescriptions de l'article 55
du Code civil.
En conséquence, nous adjurons tous médecins ou sages-femmes de
s'opposer au transport des enfants à la mairie et de se
contenter d'une déclaration pure et simple de la naissance, nous
conseillons, en outre, aux familles qui n'auraient eu
l'assistance d'aucun médecin ou sage-femme, tout en exécutant
l'article 55 du Code civil, de s'abstenir d'envoyer leurs
enfants à la mairie, leur affirmant qu'elles agiront ainsi selon
leur droit, le voeu et l'esprit de la loi, d'accord en cela avec
la raison et l'humanité. »
Il faut attente à Paris le 1er janvier 1869, pour que
les naissances soient constatées à domicile par des médecins
commis. Mais une circulaire du Ministre de l’intérieur du 9
avril 1870 invite les maires des autres villes à de conformer,
pour les constatations des naissances à la nouvelle pratique de
Paris, dans toutes les localités où un service semblable
pourrait être convenablement organisé ; les allocations votées
pour la rémunération des médécins-vérificateurs sont à la charge
de la commune.
Mais la présentation de l'enfant à l’officier de l’état-civil,
ou tout au moins au médecin-vérificateur dans les cas où les
communes appliquent la circulaire ci-dessus, fait partie des
formalités de l'acte de naissance : par conséquent la
présentation, doit toujours être exigée pour que l’acte soit
complet.
Cependant, la rédaction d’article 55 ne permet pas formellement
la présentation à un médecin-vérificateur, qui n’est pas
officier d’état-civil : c’est pourquoi cet article est cité
parmi les quelques exemples où le gouvernement, par ses
circulaires, est à l’origine d’une inexécution des lois (voir
par exemple l’article de M. Auby dans la Semaine Juridique
du 1er janvier 1953) : ainsi, avant la fin du XIXème
siècle, la présentation obligatoire de l’enfant, toujours
indiquée sur l’acte d’état civil, n’a plus lieu dans les faits,
y compris dans les petites communes.
Pourtant cette présentation obligatoire n’est supprimée que par
l’article 4 de la loi du 20 novembre 1919.
« Art. 55. - Les déclarations de naissance seront faites,
dans les trois jours de l'accouchement, à l'officier de l'état
civil du lieu.
Lorsqu'une naissance n'aura pas été déclarée dans le délai
légal, l'officier de l'état civil ne pourra la relater sur ses
registres qu'en vertu d'un jugement rendu par le tribunal de
l'arrondissement dans lequel est né l'enfant, et mention
sommaire sera faite en marge à la date de la naissance. Si le
lieu de la naissance est inconnu, le tribunal compétent sera
celui du domicile du requérant. »
Puis l’article 1er de la loi du 7 février 1924
supprime les témoins, par cette rédaction réduite du second
alinéa de l’article 56 du code civil : « L’acte de naissance
sera rédigé immédiatement. »
Et il faut attendre la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 pour
que le délai de déclaration de « trois jours » soit porté à «
cinq ».
|