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Histoires criminelles du Blâmontois (13)
Blâmont - 1922

Voir aussi Histoires criminelles


Est-Républicain
4 août 1922

Sauvage agression sur la grand'route
Lunéville, 3 août. - Ce matin, M. Duhaut, 23 ans. demeurant à Blâmont, et manœuvre à l'entreprise Pagnier, à Harbouey, a été trouvé mort sur la route de Blâmont à Harbouey. Il portait à la tète de profondes blessures. Auprès du corps gisaient sur le sol deux bouteilles brisées II y a tout lieu de supposer que les agresseurs du manœuvre lui ont cassé les bouteilles sur la tête La veille, Duhaut s'était rendu à Blâmont et c'est en revenant de cette localité qu'il a été attaqué.
A la dernière minute, nous apprenons que ses deux agresseurs ont été arrêtés.


Est-Républicain
5 août 1922

Le meurtre de la route d'Harbouey
Nous avons annoncé hier que les deux meurtriers du manoeuvre Duhaut avaient été arrêtés Ce sont les frères Vary. Ceux-ci avaient passé la soirée de mercredi à Blâmont en compagnie de Duhaut. Ils rejoignaient tous trois Harbouey, après avoir bu plus que de raison. En arrivant à l'endroit où fut découvert le .cadavre du malheureux Duhaut, une discussion se produisit entre les deux frères et Duhaut. Ici, l'on est obligé de s'en tenir aux déclarations des frères Vary, la scène du meurtre n'ayant pas eu de témoin.
Edmond Vary aurait voulu, pour plaisanter, s'emparer d'une, bouteille de vin bouché que portait Duhaut. Celui-ci se fâcha et frappa Vary. Les deux frères se jetèrent alors sur Duhaut et- lui brisèrent, deux bouteilles sur le crâne
Les deux frères Vary ont été amenés au parquet et écroués à la maison d'arrêt de Lunéville.


Est-Républicain
22 janvier 1923

La session des Assises s'ouvre aujourd'hui
C'est aujourd'hui à neuf heures du matin que commencera la session des assises de Meurthe-et-Moselle. Elle sera présidée par M. Tourdes, conseiller à la Cour d appel de Nancy.
[...] Mardi .après-midi comparaîtront devant la cour d'assise les frères Edouard Vary, 33 ans, et Émile Vary,25 ans, manoeuvres à Blâmont qui ont tué un homme pour une bouteille de vin de Bourgogne !
Le 22 août, ils s'étaient rendus à Blâmont avec leur camarade Duhaut. Ils passèrent la soirée dans les différents débits et, au moment de partir, ils achetèrent deux bouteilles de Bourgogne qu'ils voulaient offrir a leur cantinier, M. Pasqualini, à l'occasion de sa fête. Ils avaient parcouru environ deux kilomètres sur leur camion automobile, lorsque Vary Edouard voulut boire une des deux bouteilles. Duhaut refusa de la lui donner. Ce fut l'occasion d'une rixe, au cours de laquelle les frères Vary assommèrent le malheureux Duhaut à coups de bouteille et lui tranchèrent la gorge.
Les frères Vary seront également défendus par Me Mougin, du barreau de Lunéville.


Est-Républicain
24 janvier 1923

Cour d'assises de Meurthe-et-Moselle
Le meurtre de Blâmont
Mardi après-midi ont comparu devant le jury, les frères Edouard Vary, 33 ans et Emile Vary, 25 ans, nés à Verdenal, manoeuvres à Blâmont, accusés d'avoir tué un de leurs camarades, M. Duhaut Paul, âgé de 23 ans, dans des circonstances que relate ainsi l'acte d'accusation :
Le 2 août 1922, vers la tombée de la nuit, Vary Edouard et Vary Emile, se rendirent à Blâmont avec leur camarade Duhaut, en voyageant sur un camion automobile. Ils passèrent la soirée à boire ensemble dans plusieurs débits.
Vary Emile acheta au débit Bains, deux bouteilles de vin de Bourgogne, qu'il voulait offrir à M. Pasqualini, cantinier, à l'occasion de sa fête. Il mit l'une des bouteilles dans sa poche et confia la seconde à Duhaut. Vers 22 heures, ils quittaient Blâmont.
Après s'être éloignés de deux kilomètres environ de cette ville, ils se trouvèrent sur le territoire de la commune de Barbas, la bouteille de vin bouché dont Duhaut était porteur devint l'occasion d'une discussion. Vary Edouard, qui voulait boire, demanda à Duhaut de lui donner la bouteille qu'il portait. D'après les accusés, Duhaut aurait refusé et donné des coups de poing à Vary Edouard.
Quoi qu'il en soit, Vary Edouard se jeta sur Duhaut, lui arracha la bouteille des mains et s'en servit pour le frapper à la tête ; Vary Emile se précipita sur le malheureux Duhaut et le frappa aussi avec la bouteille dont il était resté porteur. Duhaut roula dans le fossé et commença à râler. Vary Edouard, avec une sauvagerie révoltante, se mit à piétiner le moribond pour l'achever, puis il lui trancha le coup avec son couteau de poche.
L'autopsie pratiquée par M. le docteur Hanriot, a révélé que la victime avait été frappée avec la dernière brutalité et portait les traces d'une plaie au crâne ; d'une fracture à la tempe gauche ; d'un coup de couteau tranchant la carotide ; de nombreux coups de bouteilles avec lesquels le crâne avait été réduit en bouillie.
Après avoir essayé de nier les faits, les frères Vary ont finalement reconnu leur culpabilité.
Les accusés n'ont pas d'antécédents judiciaires. Ils ont la réputation d'avoir un caractère violent.

L'INTERROGATOIRE
De grande taille, assez robuste, le visage allongé, les lèvres ombragées d'une fine moustache blonde, le regard sournois, Edouard Vary est vêtu d'un pantalon de velours et d'un veston usagé. L'échancrure du gilet laisse apercevoir une chemise sans col. Edouard Vary répond d'une voix timide aux questions qui lui sont posées et il gardera pendant toute la durée des débats, une attitude correcte.
Son frère Emile, qui paraît plus distingué, a une physionomie ouverte, presque sympathique. Il est vêtu d'un pardessus à col de velours et ses cheveux sont coquettement séparés dans le milieu par une raie. Il tient en main un mouchoir derrière lequel il cache parfois son visage..
M. le président évoque tout d'abord les antécédents des accusés, qui sont tous deux célibataires.
Leurs parents étaient d'origine alsacienne, ils habitaient Verdenal. Leur père est décédé, mais leur mère vit encore.
Dès leur jeune âge, ils furent livrés à eux- mêmes. Ils travaillaient comme garçons de culture chez différents fermiers de la région de Blâmont. Les uns disent que Vary Edouard était assez doux de caractère, mais qu'il s'attardait parfois dans les cafés. Il a eu pendant la guerre une conduite honorable. Il fut blessé trois fois et cité à l'ordre de l'armée. Versé dans le service auxiliaire, il demanda a repartir au front. Il a eu un frère tué à l'ennemi. Après l'armistice, il travailla sur les chantiers de reconstruction à Blâmont On dit qu'il avait un penchant pour la boisson et il était médiocrement considéré.
Vary Emile a eu, lui aussi, une belle attitude pendant la guerre. Il servait dans l'intanterie et fut cité à l'ordre du régiment. Fait prisonnier en 1918, il vint après l'armistice, travailler avec son frère dans la région de Blâmont. On le représente comme étant un peu sournois et querelleur après boire. M. le président ajoute que les renseignements recueillis sur la victime, Paul Duhaut ne sont pas des meilleurs. Il passait, lui aussi, pour un violent et il était redouté à Blâmont. Il devint cependant l'ami des frères Vary.
En jour, à la suite d'une discussion, Duhaut exerça des violences sur Edouard Vary. Ils se réconcilièrent devant une bouteille de bière et tous les dimanches, ils se rendaient ensemble à Blâmont.
M. le président fait ensuite un long exposé des faits et gestes des accusés dans la journée du 2 août. En compagnie de Paul Duhaut ils fréquentèrent de nombreux cafés et dansèrent même ensemble. Le soir, ils étaient en état d'ébriété. Les frères Vary voulurent entrer chez leur soeur. Elle les engagea en termes assez vifs à regagner la cantine où ils étaient en pension. Duhaut, mécontent, lança alors une bouteille vide contre les volets.
Ensuite ils se dirigèrent tous trois vers Barbas, où ils logeaient. A deux kilomètres de Blâmont, une discussion éclata entre eux et Duhaut fut tué dans les circonstances que l'on sait.
L'interrogatoire des accusés qui consiste surtout en un long monologue de M. le président, n'apprend rien de nouveau.
Vary Edouard déclare que s'il a tranché le cou à Duhaut s'est parce qu'il craignait qu'il ne fasse usage de son revolver après avoir reçu les coups de bouteille.
M. le président. - On n'a pas retrouvé de revolver sur Duhaut et c'est la première fois que vous donnez cette excuse.
Les frères Vary expriment des regrets du meurtre qu'ils ont commis.
On procède ensuite à l'audition des témoins.

LES TÉMOINS
M. le docteur Hanriot a procédé à l'autopsie de Paul Duhaut. Il a constaté de nombreuses plaies qu'il décrit minutieusement.
M. Léon Hainzelain, maire de Barbas, fut prévenu le lendemain matin par les frères Vary qu'ils venaient de découvrir sur la route le cadavre de Duhaut.
Les gendarmes portèrent aussitôt leurs soupçons sur eux, et, quand on eut retrouvé les vêtements ensanglantés des frères Vary, ils avouèrent.
M. Mayer Fraimann, cafetier à Blâmont, reçut dans la soirée du 2 août la visite des frères Vary avec Duhaut. Ils étaient ivres et dansaient ensemble. Il refusa de les servir, en raison de leur état.
Louis Duhaut, 30 ans, menuisier à Blâmont, est le frère de la victime. Il dit qu'un jour avant le meurtre il refusa de laisser sortir son frère parce que Vary Emile était pris de boisson et avait pris une attitude menaçante.
Il estime que les Vary n'étaient qu'en apparence les. amis de son frère, mais qu'ils avaient du ressentiment contre lui à la suite d'une ancienne algarade. Il qualifie les frères Vary « de lâches assassins » et s'écrie qu'ils sont des menteurs quand ils prétendent que Paul Duhaut avait un revolver.
M. Charles Bain, restaurateur à Blâmont, a vu dans son établissement les frères Vary et Duhaut le 2 août. Ils n'étaient pas dans leur état normal.
M. André Bernier, chauffeur à Seichamps, et. M. Victor Denis n'apprennent rien de nouveau.

LE VERDICT
M. Guyenot, avocat général, retrace dans son réquisitoire la scène du meurtre et montre que Vary Edouard en fut bien le provocateur lorsqu'il voulut s'emparer de la bouteille destinée au cantinier. Les frères Vary en assommant Duhaut et en l'égorgeant ensuite ont commis un crime lâche et odieux.
Toutefois, en raison de leur brillante conduite pendant la guerre, il ne s'oppose pas à ce que les jurés leur en tienne compte. Mais une sanction sévère n'en doit pas moins leur être infligée.
Me Mougin, présentant la défense des frères Vary, dit qu'ils ont, sous l'empire de la crainte et.de l'ivresse, commis un acte irréparable qu'ils regrettent profondément.
Il estime qu'en raison du caractère violent et querelleur de Duhaut il est probable que c'est bien lui qui frappa le premier, comme l'affirment les frères Vary. C'est pourquoi il demande à la cour de poser aux jurés la question subsidiaire d'excuse par provocation qui permettrait de descendre à une peine d'emprisonnement.
Après des répliques de l'accusation et de la défense, les deux accusés demandent l'indulgence du jury qui se retire, à 6 heures 45, dans la salle de ses délibérations. Il en revient à 7 heures 10 avec un verdict de culpabilité mitigé par les circonstances atténuantes mais rejetant la question d'excuse par provocation.
En conséquence la cour a. condamné Vary Edouard et Vary Emile à six ans de réclusion chacun.

 

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