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L'école de Mars (1794)

Arthur CHUQUET
LIBRAIRIE PLON - 1899


CHAPITRE PREMIER - La méthode révolutionnaire
[...]
La lutte que la France soutenait en 1794 contre la coalition avait enflammé les âmes. Une fièvre ardente, généreuse, s'était emparée des patriotes. Ils comprenaient qu'il fallait, pour vaincre, opérer des prodiges d'énergie révolutionnaire, des prodiges de promptitude et d'activité. «  C'est aujourd'hui, disait Barère, et non dans un an, que nous voulons des fusils.»
Les six ministères, traités de machines traînantes et routinières, furent supprimés et remplacés par douze commissions. La fabrication des armes et des poudres, dévolue auparavant à trois ministères, fut confiée à une commission centrale et cette commission, mise sous la surveillance immédiate du comité de salut public.
Des ateliers s'élevèrent à paris et les ouvriers des manufactures des départements vinrent y apprendre leur métier, vinrent, comme on s'exprimait alors, apprendre dans ce paris brûlant de patriotisme, à la fois le républicanisme et l'art de forger la foudre.
Le comité fit mieux encore. fidèle à sa maxime de tout créer et de tout accélérer, il fonda l'école des armes. Le 2 février 1794, il arrêtait que tous les districts de la république et toutes les sections de Paris délégueraient deux citoyens robustes, intelligents, tirés des compagnies de canonniers. Ces citoyens, choisis par les administrateurs du district sur la présentation des sociétés populaires, seraient âgés de vingt-cinq à trente ans, et l'un des deux devrait savoir lire et écrire. Ils viendraient à Paris pour suivre pendant trois décades des cours sur l'art de raffiner le salpêtre, de fabriquer la poudre, de mouler, fondre et forer les canons. Ils auraient un état de route comme les canonniers de l'armée et toucheraient quotidiennement trois livres pendant leur séjour. La municipalité de paris les logerait dans la caserne de la rue de Lourcine, et nommerait un inspecteur chargé de les accueillir et de leur donner tout le nécessaire.
[...]
Un mois suffit pour instruire les élèves, pour former, selon un mot du temps, huit cents Salmonées qui se répandirent dans les ateliers de la République et initièrent leurs compatriotes aux procédés de la fabrication des poudres et des armes : la France, disait-on, allait devenir un arsenal; [...]
Mais pourquoi en rester là ? Pourquoi ne pas continuer l'oeuvre commencée, ne pas faire d'autres merveilles d'instruction ? Ne suffisait-il pas de joindre au patriotisme une science qui ne serait pas pédantesque, d'ouvrir pour quelques instants des écoles où d'excellents professeurs réuniraient autour d'eux des jeunes gens doués d'heureuses dispositions ? [...] Que les districts envoient à Paris plusieurs de leurs citoyens, que ces citoyens, une fois instruits, reportent leur instruction toute fraîche dans leur ville, dans leur village et «  sur une grande surface ».[...]
La Convention avait décrété que tous les Français de dix-huit à vingt-cinq ans iraient défendre la frontière. Mais ne devait-elle pas s'intéresser à ceux de seize ans, de dix-sept ans, de dix-sept ans et demi ? Pourquoi la République ne s'emparait-elle pas de cette portion de la jeunesse ?
Pourquoi ne façonnerait-elle pas ces adolescents par une éducation révolutionnaire, et, puisqu'elle prenait plaisir à la guerre, puisqu'elle était victorieuse et voulait suivre sa pointe, puisqu'il fallait porter à la perfection, comme disait Barère, un art terrible qui devenait nécessaire au salut de la liberté, pourquoi ne leur donnerait-elle pas une instruction martiale, toutes les connaissances et les moeurs des soldats républicains ? Quelques mois, quelques semaines suffiraient à leur inspirer le patriotisme et le civisme, la haine des tyrans et la pratique de la fraternité [...]
L'idée de l'École de Mars venait sans doute de Barère. Elle fut avidement accueillie par Robespierre.[...]

CHAPITRE II - Le décret du 1er juin

Le 1er juin 1794 (13 prairial an II), Barère lisait à la Convention, au nom du Comité de salut public, son rapport sur la fondation de l'École de Mars [...]
La République allait donc s'emparer d'une portion de la jeunesse, de cette classe si «  intéressante » qui produisait les Bara et les Viala: trop jeunes pour être astreints à la réquisition militaire, trop âgés pour entrer dans les écoles primaires dont la Convention décréterait bientôt l'établissement, ces adolescents devaient recevoir une éducation révolutionnaire et républicaine, se soumettre à une suite d'exercices et de travaux dans une école spéciale. Cette école se nommerait l'Ecole de Mars. Ses élèves, au nombre de trois mille environ, les meilleurs de leur génération par l'esprit et la force physique, auraient une instruction uniforme, mangeraient à la même table, travailleraient dans le même camp. [...]

CHAPITRE III - L'ouverture de l'École

Sitôt que le décret du 1er juin fut connu dans les départements, les jeunes gens se présentèrent en foule et les municipalités n'eurent pas de peine à désigner des candidats. La plupart des districts se plaignirent de ne pas fournir un nombre d'élèves proportionné au chiffre de leur population et demandèrent, inutilement d'ailleurs, l'autorisation de tripler, de quadrupler leur contingent.
[...]
L'agent national du district de Blamont marque que les six élèves qu'il a nommés sont tous sans-culottes : «  J'espère qu'ils donneront de bons républicains; ils l'ont été jusqu'à présent et m'ont jure de continuer. »
[...]
l'agent national du district de Blamont, remarquant qu'il n'existait dans le district aucune commune dont la population atteignit deux mille âmes, décidait, comme il dit, de «  choisir partout ». [...]

CHAPITRE VII - Après le 9 Thermidor

Les thermidoriens savaient que la plupart des instructeurs sortaient de l'armée révolutionnaire et ils craignaient que les jeunes sans-culottes du camp, entraînés par l'irréflexion de leur âge et par le fanatisme jacobin, ne prissent parti contre le nouveau gouvernement.
Dès le lendemain de la défaite du Robespierrisme, ils manifestaient hautement leurs défiances. Dans la séance du 30 juillet, Tallien pria la Convention de porter son attention sur l'École de Mars. Il déclara que Le Bas avait interdit l'entrée du camp des Sablons à des représentants qui désapprouvaient Robespierre et notamment à Durand-Maillane, que Robespierre voulait réunir dans cet établissement une armée de séides, [...]
Fréron assurait dans L'Orateur du Peuple que Barère n'avait rédigé son rapport sur la formation du camp que pour seconder les desseins de Robespierre. «  L'institution du camp, disait-il, peut être avantageuse à la République si elle est bien dirigée. Mais, soyons-en sûrs, lorsque Barère l'a proposée, il se disait à lui-même : cet établissement sera très utile à mon seigneur et maître pour ses projets [...] »

CHAPITRE VIII - Fermeture de l'École

L'École de Mars était donc condamnée et ne devait plus renaître.
Le 23 octobre, Guyton de Morveau montait à la tribune de la Convention et lisait au nom du Comité de salut public un rapport sur l'École de Mars. [...] Sans doute, ajoutait Guyton avec quelque embarras, il était naturel de souhaiter la durée d'une institution aussi utile. Mais pouvait-on envoyer les élèves dans une armée où ils formeraient un corps particulier et, - ce que ne disait pas Guyton, - où la singularité du costume aurait attiré sur ce bataillon sacré les plaisanteries du soldat ? La politique et l'égalité s'opposaient à cette mesure. Pouvait-on les transférer dans un des édifices de Paris ? Ce casernement exigeait des préparatifs, des approvisionnements, une nouvelle manutention à laquelle il était impossible de pourvoir avant la levée du camp. Il faudrait soumettre les jeunes gens à un régime tout différent qui n'était pas l'oeuvre d'un jour; il faudrait les astreindre à une discipline plus exacte, garantir leurs moeurs des dangers de la chambrée, leur interdire par une succession ininterrompue d'exercices l'oisiveté et conséquemment la corruption.[...] L'École devait «  cesser pour se renouveler », et les élèves allaient, au nom de l'égalité, «  faire place à ceux que leur âge appelait à participer, à leur tour [...] ». Ils rentreraient donc dans leur district, concluait Guyton [...]
Le Comité renvoyait ainsi les enfants de Mars en les couvrant de fleurs. L'habile rapport de Guyton fut accueilli par des applaudissements unanimes. Les plus ardents jacobins n'osèrent protester [...]
Le même jour, sur la proposition de Guyton, la Convention décréta qu'en conformité de la loi du 1er juin le camp des Sablons serait levé, que les élèves de Mars retourneraient dans leurs foyers, qu'ils emporteraient et conserveraient comme leur propriété leur sabre, et les effets d'habillement et d'équipement qui avaient été à leur usage personnel, leurs trois chemises et leur havre-sac. les fusils, les piques, les canons et engins d'artillerie, les chevaux et leur harnachement, les objets de campement, ustensiles, outils et autres fournitures seraient remis aux magasins nationaux qui les avaient livrés.[...]

PIÈCES ET NOTICES

Liste des élèves de l'École de Mars
PAR DÉPARTEMENTS ET DISTRICTS
[...]
MEURTHE
[...]
Blamont.

Lemaire Augustin.
Roussel François.
Pinoit Michel.
Pierson Martin.
Jalin François.
Boudot Jean-Baptiste.

 
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Costume des élèves de l'Ecole de Mars

NDLR : la singularité de l'uniforme de cette école, dessiné par le célèbre peintre David, parait effectivement justifier les remarques dans le texte ci-dessus :
- «  où la singularité du costume aurait attiré sur ce bataillon sacré les plaisanteries du soldat. »
- «  garantir leurs moeurs des dangers de la chambrée » 

 

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