| 
               Sociétés de tir et 
				de préparation militaire en Meurthe-et-Moselle de 1872 à 1914 
				Paris- Bibliothèque nationale - 1979 
				Marie-Thérèse Aubry 
				Tiré à part de "Actes du 103e congrès national des sociétés 
				savantes", Nancy-Metz, 1978 
				Nous allons retracer 
				rapidement, grâce à son bulletin trimestriel les vicissitudes de 
				la Société de tir de Blâmont-Cirey-sur-Vezouse, fondée en 1885. 
				En 1890, sur l'initiative du docteur Hanriot, la société se 
				transforme en société mixte de tir relevant du 41e 
				régiment territorial d'infanterie. Le même docteur Hanriot 
				veillera encore sur les destinées de la société en 1924, bel 
				exemple de longévité au service des sociétés de tir, mais on en 
				trouverait d'autres, par exemple à Nancy. En janvier 1906, nous 
				assistons à la naissance du Bulletin trimestriel de la société 
				de tir de Blâmont-Cirey qui paraîtra jusqu'en novembre 1913. Dès 
				sa parution, le bulletin fait état du patriotisme des Marches de 
				l'Est: tout le monde comprend l'importance des sociétés de tir 
				et les vaillantes populations de l'Est ont été les premières à 
				se mettre à la tête du mouvement. 
				L'inspecteur d'enseignement primaire et le conseiller général 
				Bentz envoient une circulaire aux maires des communes du canton 
				de Blâmont en vue de favoriser le tir scolaire. On demande aux 
				maires de faire les frais d'une installation de tir scolaire.
				 
				L'industriel Bechmann, ancien capitaine du génie, prône la 
				nécessité de l'instruction du peuple pour le tir au fusil. En 
				1906, aux dires de l'administration du bulletin, le stand de tir 
				est modifié, agrandi, embelli. 
				En mai 1907, a lieu un concours de tir scolaire auquel 
				participent les élèves des communes des deux cantons. 
				L'inspecteur d'Académie déclare à cette occasion que depuis un 
				certain temps, la société est l'objet d'attaques injustes de la 
				part d'un compatriote, d'un Lorrain. 
				En novembre-décembre 1907, est formée une nouvelle section de la 
				société : «  La Fanfare de la société de tir ». Au lendemain de 
				la fête de 1906, avait été formé un comité de femmes de France, 
				recrutant 65 adhérentes. Le maire de Blâmont, Labourel, s'élève 
				vivement contre l'antimilitarisme : pense-t-il à la venue 
				récente à Nancy de Jaurès et à l'hervéisme alors en vogue à 
				cette époque parmi certains ? 
				C'est qu'en 1907, la société s'élève à près de 1 600 membres, 
				actifs ou honoraires, majeurs ou pupilles, sapeurs-pompiers ou 
				sauveteurs, élèves ou adhérents du tir scolaire. Et le maire de 
				s'écrier auprès de ses jeunes auditeurs : «  jeunes gens, venez 
				au stand, vous trouverez des bonnes volontés pour vous mettre en 
				garde contre les excitations antipatriotiques. » 
				Le conseiller général Bentz fait allusion à la circulaire du 
				ministre de l'instruction publique, du 26 avril 1907 adressée 
				aux préfets, invitant à organiser le tir dans chaque école. Il a 
				demandé au conseil général, à la session d'août 1907, que l'on 
				réorganise à l'école sur le même plan que l'enseignement de la 
				gymnastique, l'enseignement du tir. Il est fier des résultats du 
				canton, mais ne prétend pas jouer aux bataillons scolaires 
				d'autrefois. Il faut généraliser, il ne faut pas que dans l'Est 
				seulement, on s'épuise en efforts considérables. 
				Un instituteur de Blâmont se fait l'écho des sentiments de tous, 
				en déclarant : «  si malgré les prévisions optimistes, l'avenir 
				s'assombrissait, nous sommes sûrs que nos anciens élèves, 
				soldats ou citoyens des Marches de Lorraine y répondraient : «  
				France, toujours ! » ». 
				En 1909 se constitue l'Union blâmontaise des pupilles de la 
				préparation militaire (patronage laïque) avec pour président 
				Labourel, le maire de Blâmont, pour vice-président le docteur 
				Hanriot, comme membres du comité l'industriel Bechmann, le 
				conseiller général Bentz. 
				Sous l'impulsion du dynamique industriel Georges Mazerand, est 
				organisé à Blâmont le dimanche 13 août 1911 le premier concours 
				régional de préparation militaire, en même temps que le 8e 
				concours de l'Association des gymnastes de Meurthe-et-Moselle. «  
				Il y aura ce jour là, note le bulletin, à deux pas de la 
				frontière, une grande manifestation patriotique ». Le discours 
				du général Thévenet est remarqué : «  les peuples forts sont 
				seuls respectés et la France désarmée ne serait plus la France 
				». 
				 
				Mais finis les feux de la fête, voilà la société de Blâmont en 
				butte à un retentissant procès. Les journaux militaires : Le Tir 
				national, L'Armée nationale, journal des S.A.G. se font l'écho 
				du procès perdu par la société dans le litige qui l'opposait au 
				Blâmontois Lafrogne. Je cite l'Armée nationale : «  la société de 
				tir, de préparation militaire et de gymnastique de Blâmont-Cirey 
				de Meurthe-et-Moselle, vient de perdre devant le tribunal civil 
				de Lunéville, un procès qu'un riche propriétaire de Blâmont lui 
				avait intenté depuis 7 ans en raison du danger encouru par sa 
				ferme à cause de la proximité du champ de tir ». L'Est 
				Républicain est plus explicite et signale l'arrêt du Tribunal 
				condamnant la société laïque de tir... républicain de Blâmont 
				sur la demande de Lafrogne. Qu'à cela ne tienne, on a perdu un 
				procès, mais l'on ne s'avoue pas vaincu pour autant. Et avec 
				ardeur, on prépare l'aménagement d'un nouveau stand. A partir du 
				1er avril 1912, on installe sur le champ de tir une série de 
				véritables blockhaus, mur en pierre froide, tunnel de 6 m de 
				long, plaques en tôle d'acier chromé, huit rangées de paraballes, 
				avant d'atteindre les cibles. 
				Une délégation est chargée de solliciter et recueillir les 
				cotisations des sociétaires. 
				Le concours de tir scolaire du dernier mercredi de mai reçoit 
				une réponse favorable des instituteurs des communes des cantons 
				de Blâmont et de Cirey et en outre de celui de Mignéville «  dans 
				leur foi patriotique, nous apprend-on, ils voulaient montrer 
				leur solidarité et faire bloc contre la coterie qui avait 
				escompté la fin de la société ». 
				Le 18 août, l'occasion de participer à une nouvelle 
				manifestation est fournie par le concours annuel de 
				l'Association des gymnastes de Meurthe-et-Moselle organisé en 
				1912 à Dommartin-lès-Toul, sur le terrain de manoeuvres. 
				Le Mérite national, bulletin officiel et organe des sociétés de 
				préparation militaire déclare alors.: «  au début la préparation 
				militaire n'avait guère pour clients que la population ouvrière 
				des villes, deux éléments lui manquaient: la bourgeoisie et le 
				paysan. La bourgeoisie se contentait de pratiquer les sports et 
				dédaignait de se préparer au service militaire, le paysan ne se 
				préparait pas, faute de moyens. 
				Aujourd'hui, tout est changé, surtout depuis les affectations 
				spéciales ». 
				Le point de vue des rédacteurs du Bulletin de la société de tir 
				de Blâmont-Cirey en septembre-octobre 1912 est moins optimiste : 
				«  nous devrions avoir 1 000 jeunes de moins de 21 ans, nous n'en 
				comptons que 291. L'ennemi de nos stands, c'est l'insouciance. 
				Et pourtant, n'avons-nous pas les tout premiers dans la région 
				de l'Est, notamment Maringer président de la Fédération des 
				sociétés de tir de l'Est, créé et organisé dans les écoles de 42 
				communes, le tir scolaire ». De 10 à 13 ans, les instituteurs 
				ont sous la main leurs adhérents. Après, les adolescents leur 
				échappent. 
				En novembre-décembre 1912, un nouvel effort de propagande est 
				tenté. Lors de la fête de distribution des prix le 8 décembre 
				1912, le général Varin déclare : «  la fédération de vos sociétés 
				peut être citée comme un modèle. Sous l'impulsion de son 
				président le docteur Hanriot, elle a pris un grand développement 
				». Il semble bien qu'en dépit de ces propos de circonstance, la 
				société de Blâmont-Cirey ait alors connu une crise. Mais nous 
				savons qu'après les hostilités, son président sera toujours 
				fidèle à son poste.  |